Dès le générique, la poésie point, une volute se répandant sur l'écran dévoile par double exposition des parcelles de tableaux de Turner; comme une fenêtre sur son oeuvre.
Le film campe ici la vie du célèbre peintre anglais, avec une poésie et une pudeur toute particulière qui transparaît à chaque plan. Véritable hommage à son univers, chaque plan se pare d'une superbe photographie, faisant de ce film une oeuvre picturale à part entière aux couleurs chaudes et diffuses.
Outre la beauté de l'image , et l'admiration palpable dans la réalisation Mr Turner nous permet de découvrir l'ambivalence de ce génie demeurant sensible et pudique sous ses airs de gargouille bourrue et renfermée. Ainsi la réalisation laisse la par belle à l'introspection du peintre, évoquée de manière récurrente par une fenêtre ou une porte ouverte sur le paysage (métaphore de l'âme), Turner nous tournant le dos.
Timothy Spall livre ici une sublime interprétation incarnant tour à tour, un génie et une créature proche des personnages de Victor Hugo, où le grotesque fini par mettre en exergue le sublime que le personnage porte en lui. Ainsi des scènes parfois rustres voire bestiales entre Turner et sa bonne , mettent en scène le mal être de cet homme oscillant sans cesse entre une sensibilité extrême et une impossibilité à communiquer. Il y a ainsi quelque chose d'infiniment touchant dans cette dualité qui le suivra jusque dans la folie (même si la communication semble s'améliorer avec Mme Booth).
Un beau moment de temps suspendu où la poésie transparaît à chaque plan, à chaque tic sur le visage de son protagoniste en définitive prismatique et profondément humain.