Il y a beaucoup de choses à dire sur The invention of lying. Non pas sur son titre français, Mytho man, titre hautement ridicule, confinant même à l’insulte, provoquant, au-delà de l’humiliation et de l’abêtissement dont est victime le spectateur, victime également des marketeux cocaïnés stupides et arrogants, un rejet de la production avant visionnage, rejet du à ce manque de respect, non, il y a beaucoup à dire sur la structure du film, et notamment le fond qu’il développe.

S’il faut évacuer les détails, disons que le film tient la route, tout comme son casting, sa musique, etc. Ce n’est pas l’objet. Tout n’est qu’un joli décor, pour quelque chose d’autre.

Ce qui compte ici, c’est l’idée qui est développée. Dans un monde où personne ne peut mentir, quelqu’un découvre cette capacité par hasard et décide d’en profiter un peu. C’est alléchant. Même si au fond, il ne s’agit que d’une comédie romantique, le concept met l’eau à la bouche, plein de promesses, de sociologie, de politique et de psychologie de comptoir.

On est curieux de voir comment est mis en scène ce monde particulier. Un monde où avec la sincérité, vient la crédulité. Tout le monde croit tout puisque personne ne ment jamais. Il faut se faire à l’idée, se dire qu’il n’y a aucune demi-vérité, ni aucune erreur, aucun mensonge par omission possible. C’est basique. Un peu trop. Mais c’est comme ça, il faut s’y faire. Si on devait rajouter des subtilités, le concept prendrait un sérieux coup dans l’aile. C’est un monde simple, où tout le monde dit tout ce qui lui passe par la tête. C’est un monde pas détestable, et plutôt reposant, même s’il entraîne forcément son lot de blagounettes et de situations cocasses, gênantes, prévisibles mais comiques.

Dans ce monde, le physique des gens est glorifié, tout comme l’apparence en général. Enfin, sa glorification est assumée. Un détail qui a son importance, surtout dans notre monde à nous, où on ment plus qu’on respire, où on assène des vérités qui ne le sont que parce qu’elles sont bonnes à dire et où tout ce qu’on pense vraiment reste caché, parfois jusqu’à nos propres yeux. Bon, dans le film, ils poussent la sincérité jusqu’à l’eugénisme, c’est un peu gonflant, faut le dire. Ça n’apporte rien, et on ne nous propose aucune justification.

Le problème de la crédulité dont font preuve tous les habitants de ce monde, c’est qu’elle va de pair avec une sincère naïveté. Mignonne pour les femmes, qui ne sont que des objets de désir, des personnalités vénales et matérialistes, mais des objets de désir et d’amour malgré ce, et complètement stupide chez les hommes, réduits à des bacs à foutre, où s’accumule toute la merde qu’on leur met dans la tête, entre deux bières dans un bar miteux. Une mauvaise langue pourrait dire que c’est la même chose dans le vrai monde, mais ma naïveté à moi, celle que j’ai développé dans un monde de mensonges et de haine, où tout est pourri et tout, elle me fait penser que non, toutes les femmes ne sont pas encore comme ça, et qu’il reste quelques hommes ni trop lourds ni trop cons (mais là, je suis moins sur).

Du coup, la conséquence finale de cet édifice, c’est que les gens sont de gros débiles, qu’il est facile de les tromper et qu’ils ne réfléchissent jamais. C’est à ces conditions que tient l’ensemble des principes du film. Et c’est bien dommage, parce qu’on se sent floué. Comme si... On nous avait menti.


Heureusement, ce n’est pas tout. Dans cet agrégat bancal, il y a une bonne surprise, un truc couillu, un truc qui fait lever un sourcil de bonheur. La bonne surprise du film, c’est l’invention de la religion. Le lien tissé entre le mensonge et la religion n’est pas même pas dissimulé, les auteurs y vont bien franco de porc et on doit reconnaître qu’il fallait oser dire la vérité avec tous ces nouveaux mensonges (!) Le type invente le mensonge, et juste après, pour bien faire comprendre qu’il n’a à faire qu’à des abrutis, il invente la vie après la mort, dieu, et toutes ces conneries. Et les gens se soumettent.
Invention qui pose un nombre de problèmes considérables, notamment de cohérence (mariage et églises mon amour), mais qui honore le film, alors on pardonne.

Sauf qu’à nouveau, se pose la question de la stupidité des gens, qui courent après une certitude dégénérante plutôt que de rester avec quelques doutes et une certaine dose de raison. On se dit que là, ils y sont allés un peu (trop) fort. Les gens ne sont pas si cons. Pas au point d’accepter des folies, se renier pour juste un peu de confort de l’esprit. C’est pas possible. Hein, c’est une blague. C’est pas possible. Hein..? Hein..???
hillson
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le 21 oct. 2013

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