Eliza Hittman signe toujours des portraits réalistes, des parenthèses de vie qui n'ont l'air de rien mais qui bouleverse une existence. Après Beach Rats, qui retraçait la vie contradictoire d'un jeune homme à la recherche de ses désirs profonds, la réalisatrice se lance dans une approche frontale et remuante sur le thème de l'avortement. Ici, pas de pathos, pas d'effets, pas de récit labyrinthique, pas de morale ni d'interprétations écrasantes, juste un regard honnête sur une histoire rare mais néanmoins importante. Loin de toutes polémiques et de tous tabous, Never Rarely Sometimes Always suit le calvaire d'une adolescente enceinte, qui prend l'initiative de quitter sa campagne pour rejoindre New-York en compagnie de sa meilleure amie pour y avorter en toute sécurité. Galère d'argent et de moyens ainsi que la peur du regard des autres les obligent à se débrouiller sans aucune aide ni autorité parentale. Aucun flash-back nous est proposé pour nous éclairer sur son passé et aucune réponse ne nous sera apportée dans le présent. C'est clairement le genre de film où le spectateur devient le confident d'un acte caché et se raconte sa propre histoire. Parfois, les scènes de contemplation, sans dialogues, s'enchainent mais ces longueurs sont rattrapées par des scènes fortes, où l'émotion se fraye un chemin jusqu'à déborder en larmes. Tout en pudeur, ce film sans prétention ne force jamais le trait de la tragédie, et ne juge jamais le passage à l'acte de son personnage. On en déduit une histoire de corporalité, de féminité, d'avenir, d'égalité, d'émancipation, de liberté et d'injustice. En ne se penchant que sur deux jours d'une vie, la réalisatrice raconte énormément, et toute cette fluidité des émotions ne serait rien sans la déconcertante présence de Sidney Flanigan. Une belle surprise !

alsacienparisien
7

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le 30 août 2020

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