Qui est familier de l'émission télévisée Striptease ne peut pas ignorer l'existence de la juge Anne Gruwez. Alors, quel plaisir de la retrouver sur grand écran, pour un vrai long métrage de près d'une heure et demi. Les réalisateurs l'ont suivie dans son quotidien de juge d'instruction pendant trois ans, et le résultat est brut, décapant, drôle et parfois effrayant.


Pour le spectateur français, l'accent bruxellois n'aura jamais fini d'épuiser ses charmes. Ce sont des voisins, qui nous ressemblent mais qui cultivent en même temps une certaine différence, surtout dans le maniement de la langue. Le point fort du film, c'est son authenticité. Pas de commentaire, pas de voix off, juste une action, brute. Il n'y a guère que le montage qui peut altérer la réalité froide qui nous est montrée. Les auditions des témoins ou des suspect se déroulent toujours selon le même mode. Des plans serrés sur les visages, champ, contrechamp, basique. Mais même s'il s'agit d'un documentaire, la mise en scène n'est pas négligée. Ainsi, on s'amuse à regarder l'avocat à l'arrière plan, réagir aux dénégations absurdes de son client.


Mais en dehors de ces artifices, on jouit des dialogues. Même s'ils ne sont pas écrits à l'avance, ils sont incroyablement percutants. On prend peur par exemple lorsqu'un suspect renvoyé en prison promet d'aller en Syrie à sa sortie, on sourit lorsque la juge menace son "client" de le mettre au sol pour prélever son sang. On rit de bon cœur lorsqu'une prostituée dominatrice relate les sévices qu'elle inflige à ses soumis, contre monnaie sonnante et trébuchante.


On dit souvent que la réalité dépasse la fiction, c'est malheureusement vrai. Entre une froide exhumation et le récit d'une mère infanticide, on se demande dans quel monde on vit. Devant, ce film, on est juste dans le monde de la juge Anne Gruwez, jonché d'histoires sordides à chaque coin de rue de Bruxelles. C'est sa réalité, une réalité qui mérite d'être connue car c'est le prix de la justice.

Andika
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le 22 avr. 2018

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