Il y a pas nécessité d'ergoter longuement sur le film, sa beauté et sa poésie sont suffisant pour être bouleversé devant le quotidien de ces enfants abandonnés qui doivent vivre à l'abri du regard des adultes du quartier. Le casting est incroyable, ils sont tous géniaux.
Kore Eda a une approche très épurée et sincère dans sa mise en scène. Aucun artifice, rien n'est martelé, la musique n'est pas là pour nous faire tirer une larme. Au contraire, elle fait partie intégrante de la vie des enfants grâce à la reprise des notes du petit piano avec lequel Kyoto joue.
On vit le quotidien d'enfants dont on a ôté trop vite l'enfance et ce qui la compose. C'est à dire courir. Crier. Jouer. Apprendre. Rêver. Sans contraintes et sous la protection des parents. Malheureusement Akira et ses frères et sœurs doivent composer sans adultes, ainsi forcer de jongler entre cette enfance et la réalité matérielle du monde adulte.
La force du film est qu'il laisse au spectateur le soin d'apprécier ce qu'il voit, sans jamais prendre partie. Le personnage de la maman est ambiguë. Elle fait preuve d'une de douceur durant sa présence, on l’aperçoit verser une larme, et accuser les pères absents comme cause de ses allers et retours. Elle n'est pas un monstre horrible, c'est beaucoup plus nuancé. Les enfants grandissent durant le film, on observe les conséquences de ce quotidien sans parents sur leur façon d'être et de vivre.
Le film est parsemé d'instants de poésie qui m'ont bouleversé. La première sortie de Yuki avec ses chaussures qui font du bruit, main dans la main avec son frère, qui se concrétise avec un magnifique plan de nuit des deux personnages face à la ligne de train aérienne puis au passage d'un avion dans le ciel. J'ai trouvé très émouvant la façon dont l'âme d'enfant des bambins reprend le dessus sur cette réalité abrupte, composé de factures sur lesquelles on d'îlot par dessiner. Ils s'émancipent de leur cocon pour subvenir à leur besoin, en allant récupérer de l'eau au parc. La frontière entre le dedans de l'appartement et le dehors de l'apprentissage et la découverte se raccourcie pour finalement être brisée par un superbe moment introduit à hauteur de pieds et d'enfants, comme toujours dans le film avec une caméra à hauteur des enfants, qui se concrétise par un franchissement de cette frontière.
D'autres personnages gravitent autour d'eux, certains de passage comme les amis de Akira qui qui ne comprennent pas réellement ce qu'ils vivent. D'autre comme Saki, acceptant de les accompagner sans jugement.
Finalement rien n'est acquis, c'est avec rudesse et pudeur que le quotidien de ces enfants est confronté à un tragique événement, qu'aucun enfant n'est censé vivre et endurer. Le film se conclue avec beaucoup de mélancolie, incroyable d'intensité lors de la séquence à l'aéroport puis le retour en train. Difficile de ne pas être émerveillé et bouleversé devant une telle œuvre.