« Nocturnal Animals » est le second long-métrage de Tom Ford, précédé de « A Single Man » (avec entre-autre l’excellent rôle de Colin Firth). Le scénario est aussi adapté du roman « Tony and Susan » d’Austin Wright, romancier anglais, auteur de 7 bouquins dont il s’agit ici de la première et unique adaptation au cinéma.

Le réalisateur (aussi acteur à quelques reprises) n’est autre que le « célèbre » designer derrière « Gucci » ou encore « YSL », passant plus récemment chez « Yves Saint Laurent ». Il est aujourd’hui à la tête de sa propre marque de vêtements et accessoires de luxe portant son nom.
 Et ce n’est évidemment pas un hasard si le film dont nous allons parler emprunte beaucoup de l’expérience du réalisateur.


En effet, Amy Adams campe ici le personnage de Susan Morrow, évoluant dans le milieu artistique, au bord de la dépression nerveuse et remariée à Hutton (plus jeune de dix ans et travaillant à ses affaires pas franchement intéressantes). Le décor est planté … mais prenons le film à son départ.




Le générique, à la façon outrancière d’un Lynch ou Fincher, nous présente des corps difformes, tous rehaussés de la patte artistique de Ford, critiquant grassement le monde de la mode par ses tons rouges, pailletés et clinquants. Le fondu vers l’introduction du film repose brutalement les yeux du spectateur sur une ambiance feutrée, bien plus grisonnante et surtout moins vivante que le clap d’entrée. Ford nous montre ici l’étendue du talent de metteur en scène qui l’accompagne en cinq minutes.



Le temps maintenant de passer à l’aspect fondamental du projet, sa construction ...
Et c’est là que le film prend tout de suite plus d’intérêt.
Au delà de l’aspect esthétique constamment « léché » et très appréciable du réalisateur, il faut comprendre que le film nous laisse ici, et ce presque dès le début, le choix de croire ou non aux faits qui y sont relatés. Pour cause, l’ex mari de Susan, Edward Sheffield, joué par Jake Gyllenhaal, laisse à son ancien amour une lettre accompagné d’un roman en son honneur.
 C’est à partir de ce moment là où le long métrage lorgne sur plusieurs plans et points de vue différents. Et l’important, c’est qu’il le fait de façon magistrale! Le tout se découpe tout au long de l’histoire par des miroirs de la narration du récit au lecteur. Laissant ainsi un doute constant sur ce qu’on veut nous montrer réellement.

Tom Ford nous parle d’un côté du passé des deux amants, il nous montre leur rupture, le ressentiment des deux personnages ou encore la dureté avec laquelle les évènements se sont passés. Toujours de différents points de vue, mais toujours associés au présent et au personnage de Susan, qui en lisant les lignes du récit, retrace sa vie passée conjointement au drame du livre …


Autant se le dire tout de suite, nous sommes tout simplement face à une très belle réussite. Outre les plans de caméras ingénieux, la bande originale des plus juste, le jeu des acteurs (en particuliers Susan qui se veut plus « véritable »), la photographie à tomber et un scénario qui vous laisse le choix.
Monsieur Ford a bel et bien créé l’exploit de sortir une production américaine qui cherche autre chose que la surenchère et vous laisse seul juge.


N’entendez pas par là que le film est parfait, bien évidemment non. Un problème vient du récit du roman qui est représenté « textuellement » à l’image, ce qui produit donc, et c’est normal, un petit effet de film de genre au thriller, jouant sur des personnages à la limite du stéréotype; un Edward complètement vide durant les quarante premières minutes de film et Michael Shannon prenant les traits d’un chérif désabusé qui décide d’aider le premier venu jusqu’au péril de sa vie (pas franchement convaincant pour le coup).
A noter, enfin, que le film aurait été quelque peu plus digeste en perdant quelques minutes au montage; la faute à quelques plans longuets.


En définitif, et sans vous en avoir trop dit sur l’histoire au premier comme second plan, ce « Nocturnal Animals » reste selon moi une excellente pioche de cette année 2017. Sans en avoir l’air au premier abord, l’expérience se veut profonde et sans véritable concession. En oubliant une partie un peu trop lente, on y retrouvera une conclusion juste et bien amenée.


A conseiller donc.

Phisius
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Créée

le 8 mai 2017

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Romain Fourmy

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