Dans le cochon tout est bon, sauf à Cannes

Parfois la destinée d'un film est tout à fait imprévisible. Je veux dire quand un film est créé, on ne sait pas comment il sera reçu. Quand il sort, soit il est ovationné, soit il est descendu en flèche. Exemple tout con cette année : Moonlight et Bad Buzz . Voilà. Je ne pars pas sur du moins évident. Et là on commence fort avec un film qui de base n'avait rien demandé et était attendu de tous les cinéphiles comme des moins cinéphiles et est devenu polémique, mais de la manière que je trouve la plus ridicule , la plus stupide et la plus honteuse que je n'ai jamais vu de toute ma vie pour un film. Mais on y reviendra.

Un conte à message fort qui n'épargne personne

J'ai l'impression qu'il est de plus en plus difficile de faire certaines scènes sur fond vert. Je m'explique. C'est le 3e film dans lequel j'arrive à voir les fonds. Sur Wonder Woman c'était très voir trop flagrant

Et là, c'est pareil. On a un mieux au niveau imagerie mais cela se voit. C'est un détail car le reste des effets spéciaux fonctionnent bien mais les vues en plongée sur le personnage de Mija sont limites. Moins limite que les contre-plongées de Diana mais quand même. Mais à part ça, l'imagerie est vraiment classe. Les grands espaces de l'endroit où vie Mija sont vraiment différents de la ville de Séoul et New York, voir même de l'abattoir. Bong Joon - Ho utilise aussi pas mal de ralentis qui donnent de la poésie au film et un caractère enfantin. Il y a pas mal de contraste entre l'aspect conte fée du film et le coté réaliste et cru. Même le choix des couleurs est bien trouvé pour tous les personnages. Entre le blanc immaculé Lucy Mirando, le rouge et bleu de Mija (et son blanc pur à la fin), le bleu sombre et terne de Nancy Mirando, le brun de Johnny Wilcox et le noir des membres du F.L.A. Tiens, parlons en des personnages.

L'innocence n'a pas sa place

D'abord on va parler de Mija (Ahn Seo-hyeon qui a vraiment une sacrée carrière du haut de ses 13 ans. On tient la future enfant star qui réussira je le sens). C'est une orpheline qui vit avec son grand père (oui c'est cliché tout ça tout ça) et qui est attaché à son super-cochon du nom d'Okja qui est devenu un membre de sa famille à ses yeux et qui veut le ramener chez elle. Elle est très innocente mais ce rend vite compte de la réalité et de sa relative impuissance. Cependant elle demeure tenace et sa détermination est à tout épreuve.

Tilda Swinton joue à la perfection 2 rôles : Les jumelles Lucy et Nancy Mirando. Je trouve que contrairement à Ave Cesar où les 2 personnages auraient pu se fondre dans un seul personnage. Ici elle joue bien l'industrielle faussement gentille qui veut donner une bonne image des industries Mirando et sa soeur qui est la président la plus froide et caricaturale que j'ai jamais vu dans l'histoire. Mais bien que ce sont 2 clichés, cela va avec le propos du film et l'actrice joue les 2 extrême vraiment bien.

Dr. Johnny Wilcox (Jake Gyllenhal) est...wow. DC on tient le nouveau Joker là ! Sérieusement. J'ai déjà vu Jake Gyllenhal vraiment déjanté mais là il est hilarant. Il joue vraiment le sous-fifre dans toute sa flamboyance. Surjoué ? Un peu. Mais pas trop et cela rend ses monologues vraiment fun et inquiétant. Oui je le verrai bien en Joker.

Hee-bong (Byeon Hee-bong , alias le supérieur de Memories of Murder. Mâter ce film c'est un ordre !), joue parfaitement bien le grand-père qui veille sur sa petite fille et qui ne cherche qu'à la protéger, mais qui va se planter etc etc...

Autre personnage important : Jay (Paul Dano). C'est le leader du F.L.A mais il se montre très protecteur avec Mija et ne veut pas l'impliquer sans son accord (ce qui va se faire à cause de Kim (Choi Woo-shik)). Les personnages du F.L.A sont assez clichés du style hippies mais quand même sympathiques, notamment Lily Collins et ...Mimi Geignarde ? Si si il y a bien Mimi Geignarde d'Harry Potter, même si certains sont vraiment des pacifistes au delà de l'extrême. Notamment Silver(Devon Bostick) qui...ne se nourrit pas pour préserver la nature. Ouais clairement.

L'autre personnage assez intéressant Frank Dawson (Giancarlo Esposito) et son double jeu car on sent qu'il n'a aucune confiance en Lucy Mirando. Il a l'air d'être un confident mais très rapidement on sent qu'il cache quelques choses.

Un Okja dans la ville

Ce que beaucoup reprochent au film, c'est le coté simpliste de l'histoire et le fait qu'il ne soit pas original. Mais en quoi c'est un défaut ? Je vous rappelle que Shaknado possède aussi une histoire originale ! Sauf que c'est un nanar ! Le fait que l'histoire ne soit pas original ne veut pas dire qu'elle est mauvaise. L'important est que l'histoire est très bien racontée et qu'elle soit riche. Et l'histoire d'Okja possède ses 2 critères. On a un conte simple mais bien raconté avec un message percutant et qui charge beaucoup les industries de la viande. Et niveau subtilité, on est dans Get out x 5. Oui , il n'y a pas plus subtile que ça. Oui , c'est un conte en gros pro-végétarien mais qui montre un peu le cynisme des 2 cotés (entre les gens de l'industrie Mirando qui ne font tout pour l'argent , malgré les dire de Lucy et les gens de la F.L.A parfois prêt à tout pour leurs causes). Mija voit le monde tel qu'il est en dehors de chez son grand-père et même si elle est impuissante face à la situation, le film nous laisse le choix avec grâce à sa scène post - générique (oui, il n'y a pas que dans les blockbusters qu'il y a des scènes post-génériques). La réalisation et le scénario se suivent à merveille comme aime le faire Bong Joon-Ho.

Lettre ouverte à Cannes

Bref, le film est un excellent film et du bon cinéma et je recommande fortement. L'histoire est très pro-végétarien mais bon. Et avant de finir, je vais faire ce que j'ai fait pour les Nouvelles Aventures d'Aladin. Donner mon avis sur ce qui s'est passé à Cannes pour ce film. Avant ça Cannes pour moi était un festival où je pouvais découvrir des films artistiques et dont le jury était composé en partie par des personnes dont je pouvais respecter les valeurs. Cette année, je n'ai jamais eu autant honte du cinéma à cause de ça. Déjà, la chronologie des médias est une grosse connerie. Ok , je peux comprendre pourquoi elle existe, qu'il s'agit de notre système qui régit la distribution des films au cinéma et que tous les films doivent les respecter. Déjà, ça par mal car cela fait en sorte que les films sont distribués parfois très en retard, alors que lorsque c'est pour n'importe quel épisode de Star Wars, ils ont une distribution simultanée partout dans le Monde (Money !). Donc niveau chronologie non respectée on est dans de non sens + 1000. Ensuite, le film a été produit par Netflix, est-ce que vous trouvez sensé qu'une personne qui produit sa propre oeuvre doit l'exposer chez lui 3 ans après ? Ne réfléchissez pas tous en même temps. Donc même avec un système aussi contraignant, il faut être vraiment bête pour penser ça. Mais bon admettons. Es-ce que vous trouver plus logique cette règle comme quoi un film sélectionné et diffusé à Cannes soit pénalisé parce qu'il ne sort pas en salle ? Surtout que sort pas en salle est excessif parce que c'est nous qui avons été principalement embêtée (et encore, il y a certaines salles qui ont voulu braver l'interdit, mais dont certains comme le Forum des Images à Paris ont aussi fait machine arrière). Donc c'est d'une injustice au delà de l'insulte. Mais ce qui m'a vraiment énervé, c'est l’accueil de ce film : On a un film qui a été hué juste parce qu'il est produit par Netflix et que Almodovar, le Almodovar ose dire qu'un film n'est considéré comme du cinéma que si il est diffusé dans une salle de cinéma. Il s'est rétracté par la suite mais quand même. Je veux dire on en est là. Le non respect total. C'est cela qu'est Cannes. Le Festival du Cinéma n°1 au monde ! Des réalisateurs tueraient pour avoir une palme et c'est cette image là que vous offrez ! Le cinéma, quelques soit la manière dont on le voit reste du cinéma. Quand j'ai vu Okja, j'ai vu un film encore plus cinématographique que certains films qui sortent tous les ans (je préfère pas donner de nom, ils vont se reconnaître) et un film comme Okja est du cinéma, il y a quelque choses dans le film qui dit que oui c'est du cinéma. La mise en scène, le traitement de l'image tout respire du cinéma. Mais non apparemment ça ne suffit pas. Et même si Netflix rend disponible chez eux avant les salles, où est le problème ? Les salles français malgré le prix du billet qui ne fait qu'augmenter enregistre une progression (ce n'est même pas des paroles en l'air j'ai vérifié) et que Netflix vient à peine de débarquer et il y a encore pas mal de réticents. Et je commence en avoir plus qu'assez que chaque année, le cinéma ou autre invente une nouvelle manière pour nous faire honte. Le cinéma évolue, notre mode de consommation évolue et ce qui marchait il y a 25 ans est obsolète depuis 10 ans. Il faut avancer, on évolue, on change. Se conforter à ce qui marchait il y a 20 ans est contre-productif. Cela nous empêche d'avancer. Le Monde change, le cinéma change, les modes de distributions changent. A nous de nous adapter et non de se conforter sur des systèmes qui marchent de moins en moins ou des a priori stupides. C'est pour ça qu'il y a toujours des comédies pourries qui sont plus valorisées que d'autres films, que l'animation française ne s'en sort pas s'il n'y a pas un boost des critiques comme Ma vie de Courgette, qu'on reçoit des films presque des mois plus tard après leur sortie. Il faut que ça change, mais visiblement, comme dirait l'autre, il y en a qui n'ont pas reçu le mémo.

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