Il était une fois où moi même, apôtre de la beauté et du bon gout, discuter sur un site de cinéma nommé Allociné, j'y discutais avec quelques comparses à propos des films longs, causant de Das Boot, 1900 et quelques autres. Car pour moi "film long" c'est aux alentours de 4/5 heures de métrage, et j'étais content d'en avoir vu des si longs, quand tel un oncle bienveillant, malgré lui doté de pulsions d'étrangetés ghyom m'a simplement glissé la page SensCritique d'un mystérieux film, inconnu de ma personne, Out 1.
Tel un sportif qui se lance des défis, moi cinéphile je ne pouvais passer à coté de cette oeuvre ultime de 13 putains d'heures, j'étais obligé, c'est comme aller à l'église pour voir dieu, à ceci près que moi je n'ai pas été déçu.



La Nouvelle Blague



Le groupe de La nouvelle Vague nous a apporté des véritables ofni, énormément même, si on pense très souvent à Godard, Varda, Rohmer, Truffaut et certains autres, n'oublions pas Jacques Rivette, l'homme qui n'aimait pas les films courts. Bordel mais ce gars n'a réalisé que des films de plus de 2h30, à quelques exceptions près.
Alors quand passé Mai 68, il décide de se lâcher complètement en réalisant un film purement et entièrement improvisé, nous sommes obligé de causer de folie ! Si la version longue a faillie perdre la vie aux avantages de Spectre, la version courte de 4h20, j'ai appris ça dans le documentaire autour du film, il a finalement survécu grâce à une personne, le producteur, qui s'est battu pour le film à de nombreuses reprises.
Rivette réalise donc une folie ambitieuse et malgré l'improvisation maligne, ne laissant pas au hasard certains détails, comme par exemple que le film dure 13h alors que l'histoire des 13 de Balzac est au cœur du métrage, en guise de fil rouge entre les groupes et personnages. En effet l'histoire nous fait suivre deux troupes de théâtre qui se livrent à de nombreux exercices pour tirer le meilleur parti de leur jeu. Tandis qu'un sourd et muet, causant et entendant, ainsi qu'une jeune femme étrange et voleuse errent dans Paris.



In 0 / Out 1



Out 1, baptisé "Out 1" car ce fut un projet complètement out à l'époque où tout était in d'après Rivette, un projet fou que personne ne pouvait gérer. Noli me tangere signifiant "Ne m'approche pas" ou "Ne me touche pas", ce qui a un certains rapport avec les relations entre les personnages.
Rivette s'est régalé d'un casting typiquement de cette époque, Michael Lonsdale ravi de ce projet improvisé est très à l'aise, tout comme Jean Pierre Léaud en personnage hautement mystérieux et déconnecté du réel. Michèle Moretti, Juliet Berto, Françoise Fabian, Eric Rohmer, Bulle Ogier, Jean-François Stévenin, Bernadette Lafont ou encore Jean Bouise, j'en oublie évidement, comblent le casting.
La plupart étant à l'aise dans l'impro, pas tous, l'histoire se repose sur eux, les deux groupes ne se voyant d'ailleurs pas, le scénario évoluait sans que l'autre troupe ne sache où ils en étaient, complexe et fou n'est-ce pas ? Cela se ressent forcément sur 13h, que tout est créé au fur et à mesure, mais ce n'est en aucun cas dérangeant et ça prouve le talent des comédiens qui arrivent à tenir des discutions en plans séquences de souvent plus de dix bonnes minutes sans partir dans le nawak.
Parmi les 8 parties que forme la version longue se trouvent de toute évidence des longueurs, les plans séquences étant quasiment de chaque plan. Les scènes chiantes dont une est dès la première partie, presque un bon 25 minutes si c'est pas plus en suivant un groupe gueuler et se rouler par terre, hard mais heureusement peu nombreux, les moments assez pénibles sont au nombre de trois à mes yeux si je me rappelle bien, donc cela va encore, c'est excusable.
8 parties de chacune environ 1h30/1h46, le tout vu en deux fois, 4 parties pendant 2 jours à raison d'un dafalgan toutes les 10 minutes ! Nan j'déconne... pour les dafalgan...
Rivette contrôle son oeuvre tout en laissant une liberté totale à ses acteurs et à son cadreur qui explique très bien sa place dans le documentaire, hormis quelques directions donnés pour rester logique vis à vis des inventions des acteurs, tout est purement pondu sur place. Cela se remarque clairement avec les nombreux regards caméras des passants, on a envie de les tarter en leur disant "mais putain regarde ailleurs pauv' con tu vois pas que ça tourne ?!", m'enfin cela ajoute à la folie du boulot.
La remasterisation 2K du blu ray que j'ai tout de même été content de payer une trentaine d'euros plutôt que 70, est très jolie, les couleurs pétantes et un grain d'époque charmant. Le plus surprenant et inattendu aura été pour moi le morceau de tam tam ou je ne sais quoi qu'on retrouve à chaque début des 8 parties, un son qui résonne en moi et me donne envie de danser, un régal d'onirisme.


En bref, moi qui est beaucoup de mal à noter une oeuvre de 5h alors de 13h c'est encore plus complexe, ça aurait pu être un 7 mais le 8 était également une probabilité, puis vu le boulot, la dinguerie de cette oeuvre unique, ça le mérite bien je pense. Éprouvante, en bien ou en mal, ce film, ce pari, est sans fin, il aurait pu continuer encore et encore, le final n'apportant aucunes réelles précisions sur les choses. On comprend le tout certes, la force du métrage, mais l'histoire en elle même n'est pas l'important, c'est plus comme un bout de vie, un morceau de 1970 encré sur pellicule.

-MC

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