Les gentils soldats violent autant que les méchants

Cette guerre qui opposa le Viêt Nam du Sud soutenu par les Etats-Unis aux mouvements indépendantistes du Sud aidés par la Chine et l’URSS a inspiré pas mal de réalisateurs dont le très bon Brian de Palma avec son œuvre Outrages (ou Casualties of War).

Je spoil un peu.

Un soldat se fait tuer par un tireur embusqué à l’entrée d’un village ou tout semblait plus ou moins calme et sécurisé. Le sergent Meserve (Sean Penn) qui était un bon ami du défunt vit très mal cette nouvelle embuscade et commence à vouer une haine sans borne pour toute la population locale.
Pour se venger lors d’une mission de reconnaissance, il planifie le kidnapping d’une jeune paysanne en vue d’un viol collectif juste avant son exécution pure et simple.
Mais un jeune soldat épris de justice et idéaliste décide de s’y opposer fermement. Vint alors un conflit entre lui et les autres membres de l’escouade.

L’idée de porter à l’écran les déboires de quelques GI durant cette guerre sonnait comme une très bonne idée, même s’il s’agit d’un « petit » fait divers qui s’est reproduit plusieurs fois, on assiste ici à une scène de viol très traumatisante et extrêmement bien fichue.

On retrouve donc un Sean Penn qui en fait des tonnes, mais dans la logique du soldat à bout de nerf, qui déteste la guerre et surtout meurtri par la perte d’un ami proche, ça passe bien (il en est même flippant parfois). Le personnage de Michael J. Fox est lui aussi très touchant (au début), son courage face à la barbarie des autres membres de l’escouade et surtout face à la lâcheté de Diaz qui par peur des représailles, décide de participer lui aussi au viol, est super bien mis en scène.
De Palma ne tombe absolument jamais dans le voyeurisme, le spectateur assiste à une démonstration de violence allant crescendo. Tout commence avec l’enlèvement de la jeune Vietnamienne, l’escouade arrive dans le village et l’arrache brutalement à sa famille. Eriksson reste impuissant face à tant de haine de la part de ses camarades sans pour autant endosser le rôle de justicier. J’ai beaucoup aimé le fait qu’il se sente responsable à la place de ses coéquipiers et qu’il tente en vain de dire quelques mots à la famille inconsolable de la victime.
C’est pendant le viol et après, qu’on découvre le corps de la jeune Vietnamienne complètement lacéré et mutilé qu’on se rend compte que la violence est devenue une notion plus ou moins floue pour les soldats.

Si le viol et le meurtre sont assez bien foutus, j’ai eu beaucoup plus de mal avec le personnage d’Eriksson (Fox) dont les propos qui sont assez louables au début, basculent très vite dans la naïveté profonde. Je pense que le message est bien passé c’est bon. On sait que la justice doit triompher et qu’un crime ne peut pas rester impuni, que les soldats en mission devraient avoir une plus grande responsabilité etc.

Et puis même si le duo Fox/Penn a de la gueule sur l’affiche, dans le film on se rend compte que Fox serait facilement remplaçable niveau casting, non pas qu'il soit mauvais mais on a la tronche de l'emploi ou on l'a pas... Mais bon, c’était un des acteurs les plus bankable de l’époque.

La fin aussi reste très moyenne, le fait que tout cela ne soit qu’un immense flashback provoque moins «d’impact» chez le spectateur. Mais c’est surtout la rencontre d’Eriksson avec une américaine typée asiat (c’est la même actrice que la victime) en sortant d’un bus qui me laisse un peu perplexe. Il la rattrape pour lui rendre je-sais-plus-quoi qu’elle a laissé tomber et elle lui sort un truc du genre « Ce n’était qu’un mauvais rêve, c’est fini maintenant ». J’ai trouvé ça un peu facile mais pas forcément con, dans le sens où lui, peut y trouver le pardon de la victime qu’il n’a pas réussi à sauver.

Bref Casualties of War n’est pas le meilleur film de De Palma, pas le meilleur film sur la Guerre du Viêtnam et il lui manque surtout ce « petit quelque chose » qui ferait de lui un film dérangeant mais fascinant.
Par contre je maintiens que l’idée du film est très bonne « Un meurtre en temps de guerre reste un meurtre ».
Redango
6
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le 2 mars 2015

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Redango

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