• Revu en mars 2014 :
Malgré les aprioris, Del Toro nous pond ici une œuvre superbement rythmée à l'action grandiose. Des robots énormes, des monstres gigantesques, une bataille pour la survie de l'humanité. Scénario manichéen, acteurs qui font le boulot - les prestations d'Elba et Perlman sont à relever - et musique Rock'n'Roll avec le même thème en boucle. Mais qu'est-ce que c'est fun ! Les décibels s'envolent, l'action est titanesque, variée, et excellemment chorégraphiée. Et c'est beau. Les jeux de lumière nocturnes dans un Hong Kong fuschia/orangé sont un régal visuel lors des affrontements, les scènes en mer avec les bioluminescences cyan sont également superbes, et la photographie ne faillit jamais. J'avais fait l'impasse sur la 3D au ciné pensant me retrouver devant une post-prod classique, à tort puisque le rendu des Kaijus/Jaegers n'a que plus d'impact dans ce format, et le travail du détail sur la profondeur de champ est assez hallucinant. La 3D est excellente, et on apprécie encore mieux l'envergure folle du film.

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• Critique du 20 juillet 2013 :
Je n'ai jamais compris l'engouement porté à Guillermo Del Toro, surtout pour les deux volets d'Hellboy qui, bien que par moment sympathiques, sont quand même franchement kitschouilles. Cela dit, Blade 2 est mon épisode préféré dans la trilogie du Diurnambule et le Labyrinthe de Pan regorge d'idées fantastiques. Quoiqu'il en soit, Del Toro se reconnaît avant tout à travers son bestiaire unique qui se répercute dans chacun de ses films. Et quoi de mieux que transformer ces créatures monstrueuses en des entités colossales qui se fouttraient sur la gueule avec des robots tout aussi géants ?

On ne peut néanmoins pas dire que Pacific Rim démarre sur les chapeaux de roue. Déjà que mon intérêt avait considérablement diminué au vu des nombreux déçus ; eh bien toute la scène d'introduction (jusqu'à l'apparition du titre du film) a bien failli me faire sortir de la salle. Après un rapide récapitulatif avec la voix off de Charlie Hunnam pour situer le contexte (les premières attaques de Kaijus et les récidives, la créations de Jaegers,...), on nous lâche au beau milieu d'une attaque, histoire de nous montrer le processus de pilotage. Bémol, cet affrontement entre la chair et le métal prend place de nuit, au milieu de l'océan, et on ne comprend quasiment rien au déroulement du combat. Qui plus est, l'eau en CGI est flagrante, et ce combat ressemble davantage à un énorme jeu vidéo, filmé comme un téléfilm à bas coût des chaînes perdues du câble ; les cadrages sont vraiment moches. Rien de très glorieux, ni rassurant pour la centaine de minutes à suivre. Et puis c'est devenu bien, car on est alors projeté cinq ans plus tard, les personnages ont changé, et on en découvre d'autres, tout en continuant d'être renseigné sur cette menace Kaiju.

Les combats qui prennent place par la suite sont nettement plus lisibles, jusqu'à atteindre des proportions épiques lors d'un match "2 Kaijus vs. 4 Jaegers" parfaitement orchestré. La réalisation est donc bien plus soignée, avec une mise en scène très opératique, voire théâtrale, pour ces affrontements titanesques qui ne sont pas banalement saturés d'explosions, et quelques plans très beaux et vraiment bluffants (l'ascension stratosphérique) aidés de ralentis somptueux. On note toujours cet aspect jeu vidéo par endroit, notamment à cause de cette photographie extrêmement stylisée, riche et saturée en couleurs avec des nuances pourpres, vertes, bleues et oranges qui se repercutent sur l'anatomie cyan fluorescente des Kaijus pour définir la patte visuelle du film, tout en donnant un air de jamais vu à l'ensemble. Mais, certainement parce que la plupart des scènes mettant en mouvement ces entités extraterrestres se déroulent au couché du jour, l'intégration de cette pléthore d'effets numériques passe très bien et constitue des images cinématographiques saisissantes, alors qu'en plein soleil, m'est avis que ça aurait provoqué plutôt de l'effroi comme c'est le cas avec certaines scènes flashbacks ou issues de reportages. Quand bien même il y a cet optique vidéoludique, j'ai trouvé le résultat bien plus percutant qu'un Man Of Steel et quand bien même le niveau de destruction devrait, théoriquement, y être supérieur, on le trouve moindre que dans le film de l'Homme d'Acier car ça ne nous est pas montré exagérément.

Hormis tout ce qui concerne la faille et le monde des Kaijus, où ils oscillent entre cheap (les arcs électriques) et trop numériques, les effets spéciaux sont très réussis, que ce soit côté Jaegers ou Kaijus. Pour les Mechas, on pourrait repprocher un manque de détails sur les plans rapprochés, mais ce serait davantage pour chipoter. Les prises de vue réelles (le cockpit vraiment construit sur une armature mobile) s'alternent à merveille avec les vues extérieures. Et il faut admettre que les combinaisons ont vraiment la classe. Côté monstres, on reconnaît immédiatement la patte de Del Toro (Hellboy 2 particulièrement), avec ces créatures étrangement humanoïdes tout en étant reptiliennes, insectoïdes, ou ayant des aspects de dinnosaures. Les équipes artistiques ont été très méticuleuses sur le design des bêtes et n'ont pas lésiné sur les détails, que ce soit leur apparence extérieure ou même intérieure (!), pour les rendre crédibles. L'échelle du film est gargantuesque et assez impressionante, bien mieux rendue que tout ce que j'ai pu voir au cinéma, et même davantage que la plupart des films du genre, peut-être parce que l'action ne reste pas cantonné à la destruction d'une ville (et que ça se passe à Hong Kong et non aux USA) et qu'on observe ces géants sous toutes les coutures. On appréciera également d'avoir pris en compte les "lois de la physique" pour donner, non pas des robots agiles à la Transformers, mais bien des mouvements lents et lourds tant il y a de masse à gérer.

Un excellent point, surtout, c'est le fait de réussir à installer toute cette mythologie dans notre monde (enfin, surtout les pays du Pacifique, car on ne sait pas vraiment ce que ça donne pour les autres) et la rendre vraie rapidement. Qu'on soit directement projeté après l'invasion et les attaques aide sûrement car on assiste alors à des villes en ruines, des carcasses fumantes encore apparentes, des charognards qui font des organes aliens leur fond de commerce, des squelettes devenus partie entière des villes, etc... On est donc face à l'impact des Kaijus sur le monde et Guillermo Del Toro n'en fait pas trop en s'attardant abusivement sur des détails pour nous les imposer. Tout cela fait partie du background et on se laisse très vite prendre dans l'histoire. Disons également que Pacific Rim ne se prend pas excessivement au sérieux et fanfaronne plutôt son ton décalé, dans un univers sombre, qui mène parfois à des scènes délicieusement grotesques (le marché d'organes). Un ton Rock'n'Roll qui fait penser au flop de l'an dernier Battleship qui fonctionnait de la même façon, l'esthétique identitaire en moins. Et, joli concours de circonstances, ce sont de nouveau les riffs Heavy de Tom Morello qui viennent s'ajouter à la bande-son pour souligner l'aspect fun et badass. Accompagnant Ramin Djawadi, il établit alors des thèmes dynamiques, musclés et mémorables qui conviennent parfaitement aux moments de bravoure du film. La composition d'ambiance, par contre, se fait assez vite oublier.

En outre, comme d'habitude dans les films du Mexicain, il y a des personnages hauts en couleurs pour étayer tout son univers à travers une multitude de facettes différentes. On commence avec Charlie Hunnam, le protagoniste principal qui ne déroge pas tellement à la règle du héros qui va finir par être la clé du succès. Néanmoins, on peut apprécier qu'il ne nous soit pas survendu. Le bad boy de Sons Of Anarchy interprète ici Raleigh Becket, pilote de Jaeger profondément meutri par cette guère inhumaine, et il parvient à garder une touche assez naturelle qui fait qu'on l'apprécie bien. Son acolyte en est une pusiqu'il s'agit de la Japonaise Rinko Kikuchi (de Babel) qui prête ses traits à une Mako Mori désireuse de revanche envers ces créatures destructrices. L'actrice a un joli minois et la communion avec le personnage de Hunnam est agréable à regarder à l'écran ; là encore, point trop n'en est fait. Pour clore ce trio principal, Idris Elba campe le commandant Stacker Pentecost. Sans surprise, grosse classe et fort charisme pour jouer ce rôle autoritaire tout en gardant un humanisme compréhensible. En parlant de ton décalé, il faut se tourner vers le duo de scientifiques exubérants qui servent principalement les tournures comiques et farfelues : le geek déluré Charlie Day, et le docteur droit dans ses baskets Burn Gorman. Et puis, que serait un film de Del Toro sans Ron Perlman ? Avec grand plaisir, on retrouve cet acteur culte, toujours abonné à des rôles aussi éclectiques qu'improbables. Ici, c'est Hannibal Chau, le parrain extravagant du marché noir d'organes de Kaijus ; de quoi bien appuyer, de nouveau, le sérieux minimal que s'est accordé le réalisateur. Pacific Rim est avant tout un film fun.

À noter que Guillermo Del Toro a coupé presqu'une heure de scènes dédiées aux personnages et leur histoire, dans le but de garder le divertissement centré sur les robots et les monstres. Et, franchement, le long-métrage est extrêmement bien rythmé. Hormis le prologue, il est captivant tout du long, donnant clairement l'impression de durer plus de deux heures tant l'univers est parfaitement présenté et développé, et qu'aucune longueur ne jonche la route. On n'a pas vraiment affaire à un banal découpage en trois actes où on aurait dû supporter plus d'une heure de parlotte. Dans Pacific Rim, les grosses scènes d'action sont au nombre de quatre, diversifiées (même si majoritairement dans l'obscurité), et judicieusement disséminées à travers le film où elles sont encore entourées d'autres séquences dynamiques toutes aussi divertissantes. Il n'y a pas de larmoiement à l'excès ni de romance niaise qui mène sous les draps ; les discours entre les personnages sont concis, efficaces, et vont droit au but. Néanmoins quelques one-liners et dialogues sonnent kitsch, voire tombent carrément à plat. Avouons-le, le scénario demeure très simple, même s'il n'est pas dénué de sympathiques rebonds. Il y a point qui aurait pu amener à être davantage utilisé : le fait que deux pilotes partagent leurs souvenirs et visualisent ainsi toute une séquence forte du passé de l'autre comme s'ils y étaient. Il y a matière à creuser davantage (ce sera pour la suite apparemment). Pour autant on s'attarde suffisament sur chacun pour avoir l'impresison de les connaître et passer un bon moment en leur compagnie.

Si l'on pense très facilement à Evangelion, Gundam, Godzilla, voire Power-Rangers et tout autre titre culte de l'anime et des séries télévisées japonaises, Pacific Rim rend effectivement hommage au genre Mecha/Kaiju en s'en inspirant, tout en présentant vraiment sa propre vision homogène et originale de ces courants culturels en y apportant une touche artistique bien ficelée. Le film nous montre vraiment tout ce qu'on espérait voir en s'affalant dans son siège, et surtout en n'en ayant pas promis quelque chose de différent. Quand bien même, Pacific Rim demeure un long-métrage s'adressant à un public plutôt ciblé, notamment vis-à-vis de ces monstres gigantesques qui peuvent très vite apparaître kitsch pour une majorité, en dépit du précédent succès de Cloverfield. Heureusement le retour prochain d'un Godzilla titanesque aidera sûrement à démontrer les arguments massifs du genre. Et, qui sait, enfin donner l'occasion à Del Toro de réaliser Les Montagnes Hallucinées car, franchement, à part lui, qui le pourrait ?
AntoineRA
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le 20 juil. 2013

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AntoineRA

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