Blockbest 2013

Guillermo Del Toro était-il l'homme de la situation afin de livrer sa vision d'un "daikaiju eiga", autrement dit de l'univers des films de monstres japonais ? La réponse se trouvait brièvement dans son précédent long-métrage, le boursouflé et raté "Hellboy 2" avec l'affrontement homérique du démon rouge et d'une gigantesque entité verte tentaculaire. Une séquence évocatrice quant à la capacité du Mexicain à plonger dans un pan bien spécifique de l'histoire cinématographique ayant durablement marqué le bonhomme et à retranscrire son affection et son respect d'un genre souvent moqué pour ses acteurs affublés de combinaisons écrasant des maquettes de Tokyo et de ses environs. A ce titre, Del Toro s'adjoint les prestigieux services d'ILM (épaulé par Legacy effects) afin de retranscrire techniquement son hommage référencé à presque 60 années de Kaijū movies amorcés avec le "Godzilla" de Ishirô Honda démontrant de manière efficace et ultra-spectaculaire que le genre peut également bénéficier des dernières technologies numériques sans jamais sacrifier son amour des miniatures. Il convoque également son chef opérateur avec lequel il collabore depuis 20 ans, Guillermo Navarro, coupable de la fabuleuse photographie du "Labyrinthe de Pan", le résultat est tout aussi réussi !

Le "Cloverfield" de Matt Reeves avait brièvement rouvert la voie du film de monstres mais était entravé par son concept de found-footage occasionnant malgré tout des saynètes impressionnantes : ici le métrage entier est visuellement fulgurant et le décrochage de mâchoire n'est jamais loin ! Impeccablement monté, très rarement brouillon malgré ses violents affrontements mêlés aux éléments climatiques (pluie, neige, cendres...), le métrage se veut une version live d'"Evangelion" à l'impact redoutable (ah cette baston titanesque éclairée par les néons de Hong-Kong!). On croit fermement aux évènements relatés par le biais d'archives télévisées, d'images amateur ou par la voix-off du personnage principal, le futur décrit est réaliste, jamais misérabiliste et toujours emprunt de l'urgence de la survie humaine.

Le point faible viendrait davantage de la résolution hautement fantaisiste de l'apparition des monstrueuses créatures et de son final des plus communs, digne des productions estivales dont Hollywood nous abreuve depuis des années. Par contre le casting est tout à fait honorable entre un Charlie Hunnam enfiévré débarqué des "Sons of anarchy" ainsi que l'apparition haute en couleurs d'un ineffable Ron Perlman également dans la série, le métrage bénéficie d'une direction d'acteurs solide tout comme la fragile Rinko Kikuchi, idéale binôme du héros. La cerise sur le gâteau est surtout d'avoir offert un rôle fondateur au sous-exploité interprète de "Luther", Idris Elba et d'avoir vengé ses piteuses dernières incursions cinématographiques ("Prometheus, Ghost rider 2") avec ce personnage de leader charismatique et impitoyable des forces Jaegers.

Bien loin de la guimauve huilée de la saga de Michael Bay, Del toro débarque dans la place et fait des bastons Mechas/Monstres géants un spectacle total sur du Ramin Djawadi à la tonalité martiale et n'oubliant jamais l'humain, preuve en est cette magnifique séquence où une fillette apeurée fait face à une créature colossale. Assurément une des images fortes de 2013