Parasite, tel est le juste qualificatif pour un film dont la tension vous suit bien après être sorti du cinéma. Il dérange, dans le sens positif du terme. Le réalisateur manie avec brio les genres, qui s'enchevêtrent les uns avec les autres : la comédie côtoie le récit de vie, tout autant que le drame, qui frise avec l'horreur. La pâte proprement coréenne du film prend parfaitement avec le jeu de travestissement propre au théâtre classique d'un Marivaux ou d'un Molière.
Ainsi, "Parasite", cette grande pièce de théâtre, offre un jeu subtil des contraires. Membres d'une famille, complices d'une arnaque, les personnages nous apparaissent tout autant sympathiques que perturbants. Deux familles, deux lieux de vie s'opposent et s'attirent. Il y a quelque chose de pourri dans ce huis-clos affolant que constitue la demeure de luxe dans laquelle se joue l'histoire. Il y a quelque chose de moisi dans le taudis des sous-sol dans lequel se jouent et se rejouent les rouages d'une imposture.
Comme suggéré par un personnage, il s'agit pour chacun de ne pas franchir la ligne. Pourtant, de nombreuses lignes seront allègrement franchies. Seule celle du statut social est l'inexorable ligne rouge dont on se défait pas. Elle vous suit, comme si la pauvreté était une mauvaise odeur. Les lignes du genre cinématographique sont aussi poreuses : au côté du comique de situation, ayant quelque chose du théâtre de l'absurde, on trouve une critique sociale, où la pauvreté s'essaie à la richesse, à laquelle répond un drame social et familial.
Selon l'adage, "les choses répétées deux fois plaisent". On se délecte en effet du comique de répétition et de l'entrée orchestrée du fils, de la fille, du père et de la mère
dans les lieux du crime
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Le jusquauboutisme implacable de l'intrigue conjugué à l'équilibre délicat de la mise en scène est un puissant mélange qui ne laisse pas indifférent.