Nommé en 1943 par Eisenhower en Tunisie pour reprendre les commandes des troupes américaines après la débâcle de Kasserine, Patton voyagera ensuite dans les deux années suivantes dans toute la Méditerranée. Homme de guerre total, belliqueux mais aussi poète et nostalgique de siècles qu'il n'a pas vécu, Patton est un homme sans cesse en compétition, obsédé par ses valeurs et sa volonté d'être le meilleur. S'il se placera en ennemi du général nazi Rommel, ses rancoeurs seront presque plus élevées envers son rival le général britannique Montgomery ; ou même envers son ami le général Bradley qui finit par contester ses prises de décision.


Franklin Schaffner, c'est un type que j'aime beaucoup. Il fait partie de ces personnalités un peu touche-à-tout de la période du Nouvel Hollywood, avec un style que je trouve personnellement assez difficilement identifiable (pour cela, je le place aux côtés de types comme Boorman, Bob Rafelson, etc). Il est principalement connu pour la première version de La planète des singes (qui est un excellent film, je ne vous apprend rien), mais surtout pour le génialissime Papillon (et je pèse mes mots), et un peu moins pour le très sympathique Le seigneur de la guerre (avec Charlton Heston, un drame médiéval historiquement pas mal intéressant – si on passe l'utilisation de l'idée fausse du droit de cuissage). BREF, quand je lance un film de Schaffner, j'ai un préjugé positif, d'autant que son Patton est également assez réputé.


Alors, qu'en penser ? Eh bien, je suis à vrai dire assez mitigé.


Le film dure deux heures, et le premier constat c'est que je ne me suis pas ennuyé : la progression de l'intrigue est complexe, les personnages sont nombreux et maintiennent le cerveau en attention. Pour autant, je n'ai que très rarement été transporté.


Car en effet, si certes le film maintient en attention du fait de sa richesse d'évènements, ce qui importe ici c'est la mentalité de Patton ; et tout le cadre autour n'est qu'un prétexte à montrer les dérives de cet esprit atypique. Sous une apparence de film de guerre se cache finalement un biopic psychologique qui ne présente aucune caractéristiques qu'on retrouve habituellement dans les films qui traitent de la Seconde Guerre Mondiale. A titre d'exemple, la scène la plus impactante du film (tant sur la suite du récit que sur l'émotion fournie) est celle où Patton se met à frapper un soldat à bout de nerfs en menaçant de le faire fusiller. Les scènes de bataille et les quelques morts montrées à l'écran sont finalement à côté de cette scène beaucoup moins intenses.


En fait, le film est presque plus intéressant à prendre pour sa valeur documentaire que pour sa valeur cinématographique de mon point de vue. Comme dans Le seigneur de la guerre, on sent une volonté de reconstitution assez fidèle de l'environnement ; et la prestation de George C. Scott dans le rôle accentue ce côté quasi-documentaire. Ce type EST Patton, et il m'est désormais impossible de dissocier le personnage de l'acteur. On notera d'ailleurs qu'il a reçu l'Oscar du meilleur acteur, et qu'il l'a refusé en contestation de l'aspect compétitif que véhicule l'académie – et il est presque surprenant de voir que la mentalité de Scott est opposée à celle de Patton tant il s'est approprié le personnage.


Il est également à noter que le film est également le produit d'un autre génie, puisqu'on retrouve un certain Francis Ford Coppola qui n'avait à l'époque pas encore sorti les chefs d'oeuvre qu'on lui connaît. Alors, je ne suis pas un spécialiste de Coppola, mais on reconnaît tout de même cet aspect « fresque » et reconstitution qu'on retrouve dans la trilogie du parrain ou dans Apocalypse Now. D'ailleurs, fort de son expérience sur Patton, il s'inspirera du monologue initial qu'il a écrit pour Patton pour débuter Le Parrain.


Bon, en bref et en conclusion, regardez La planète des singes et surtout Papillon si ce n'est déjà fait. Et si vous avez apprécié ces films où que vous êtes passionnés par la 2GM, foncez voir Patton.

Créée

le 5 nov. 2019

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Heobar

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