Steven Spielberg en 2018, premier acte. Voir cette affiche avec Meryl Streep faisant face à Tom Hanks, et avec Steven Spielberg à la réalisation, ça a forcément de quoi générer de grosses attentes et augurer un film au fort potentiel. Déjà sorti il y a un mois, le film a reçu un accueil globalement positif, et j’ai enfin pu me faire une idée sur lui, au terme d’une séance qui confirma ce que je m’attendais à voir.


Steven Spielberg avait laissé Tom Hanks il y a deux ans dans une ville de Berlin séparée en deux. Le revoici dans la peau d’un journaliste qui sera au cœur de l’une des plus grosses fuites de renseignements de l’histoire. Le cinéaste ne met pas longtemps à nous mettre dans l’ambiance, avec un bref passage par la jungle vietnamienne en proie à de terribles affronts, puis de retour au pays, la transition vers les coulisses du dérobement d’informations top secrètes qui seront à l’origine de ce tremblement de terre médiatique sans précédent. Mené tambour battant, Pentagon Papers est dans l’urgence, l’inconnu, le stress et l’enthousiasme. Les temps morts sont relativement rares, le film mettant surtout en avant l’opiniâtreté de ses protagonistes, cherchant ici à révéler la vérité au grand jour en vertu de la liberté de la presse.


Car Pentagon Papers est un récit historique, mais comme il l’exprime clairement, il symbolise aussi l’unité de la presse, malgré les divergences d’opinion, face à un gouvernement malhonnête qui a choisi de mettre en sourdine les preuves de sa mauvaise gestion de la guerre du Vietnam. C’est aussi le courage d’une femme, seule au milieu d’hommes influents, qui, malgré une certaine fragilité, s’acquitte de sa tâche avec cœur et dévotion. On voit, dans le dernier métrage de Spielberg, divers signes d’une mise en avant des faibles contre les forts, d’une contestation d’un ordre établi par des personnes parfois malveillantes, parfois trop intéressées. La presse, messagère pour le peuple, se rend juste à temps compte qu’elle ne doit plus se laisser dicter la parole par les politiques ou par des actionnaires, mais doit assumer sa responsabilité dans la transmission d’informations et, parfois, en tant que vectrice d’opinions.


Sur le fond, Pentagon Papers s’avère donc intéressant avec des messages d’actualité et clairement explicités et compréhensibles, peut-être même un peu trop. En effet, dans ce film, Spielberg fait un peu ce que l’on s’attendait à ce qu’il fasse, c’est à dire actionner la machine, le rouleau compresseur, à coups d’envolées lyriques, avec un gros casting, de beaux effets, une narration classique et une construction très académique. Le problème ne réside pas dans la qualité, car Spielberg fait bien le travail, comme à son habitude, mais Pentagon Papers reste très encadré dans un académisme formel qui écarte tout prise de risque et conduit le spectateur sur une route toute tracée.


Pentagon Papers est donc là où on l’attend, ni décevant, ni surprenant. Il fait ce qu’on attend de lui, c’est de bonne facture, c’est bien. On est ravis de voir Meryl Streep donner la réplique à Tom Hanks, et vice versa, et de voir Steven Spielberg adresser un message symbolique à une époque qui s’y prête, quand les fake news font des ravages. Deux heures intéressantes sur un fait certes remarquable, mais pas non plus un film dont on se dit qu’il nous marquera durablement, en dépit de sa qualité certaine.

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le 26 févr. 2018

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