Wenders a fait un film à la Steve Reich ou à la Phil Glass. La répétition assumée des journées de ce nettoyeur de toilette à Tokyo est parcourue de dissonances subtiles à la fois minuscules et essentielles. Le film est très mystérieux sous sa banalité. Le héros n'est évidemment pas un "prolétaire". Il est à la fois très consciencieux dans ses tâches et parfaitement ailleurs dans sa contemplation du monde extérieur, les arbres, les ombres, les eaux, les autres dans leur simple singularité. La répétition de ses journées pourtant, ne se grippe jamais et ses variations subtiles ne font au fond que la renforcer. Rien n'est dit tout, est suggéré. On lorgne évidemment chez Ozu, mais pas seulement. Wenders reste Wenders, celui de ses débuts, celui d'"Alice dans les villes" avec sa fascination pour le trafic routier et ses villes immenses et banales. "Le moment c'est le moment" fait-il dire à son personnage principal et Wenders possède l'art de nous magnifier tous ces moments qui, ajoutés les uns aux autres, construisent une trame plus qu'une histoire. Sans doute un des grands films de 2023.