Peter Pan
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Peter Pan

Long-métrage d'animation de Clyde Geronimi, Wilfred Jackson et Hamilton Luske (1953)

Peter Pan, le film disney le plus politiquement incorrect (et un film de droite)

C'est quand même incroyable la façon dont on peut interpréter un film familial d'une façon différente dès qu'on est adulte, grâce à la double-lecture !


Loin d'atteindre le niveau de noirceur de "Pinocchio" ou de "Taram et le Chaudron Magique", on a un film qui commence joyeusement, puis dès que Wendy et ses frères vont au pays imaginaire, ça devient une succession de tentatives de meurtres (Clochette veut tuer Wendy, Crochet veut tuer Peter Pan, les pirates veulent tuer Monsieur Mouche, les indiens veulent tuer les enfants perdus et les frères de Wendy, les sirènes veulent tuer Wendy, Crochet veut tuer Lili la Tigresse, un poisson veut bouffer Clochette, etc...).

Dans mes souvenirs, Peter emmenait Wendy pour qu'elle garde son âme d'enfant et qu'elle ne grandisse pas.


Je m'étais trompé, je ne savais pas qu'en fait, c'est un gamin égocentrique qui vient quotidiennement à la fenêtre de Wendy pour l'écouter raconter des histoires sur lui-même et qui emmène Wendy au pays imaginaire uniquement pour qu'elle continue à raconter des histoires sur lui. J'ai l'impression de voir un Kuzco avant l'heure, c'est rare que Disney ait fait des héros nombrilistes à l'époque.


Le film est vraiment morbide quand on y pense, même Monsieur Mouche, que j'adorais depuis mon enfance, et que je prenais pour le seul pirate gentil de l'équipage de Crochet, et qui avait assez de potentiel pour être développé et pour se racheter (d'ailleurs c'est pour cette raison que j'avais acheté ce livre https://www.bedetheque.com/media/Couvertures/Couv_128630.jpg) demande à son patron si ça ne serait pas plus humain de trancher la gorge de Peter (et avant de parler à Crochet du bannissement de Clochette, il regrette l'époque où il tranchait des gorges, ce qui montre donc que c'est une obsession).


C'est incroyable que les deux personnages du film qui sont censés être en tort (Georges Darling et Crochet) soient ceux pour lesquels j'ai le plus d'empathie. L'un se fait voler ses affaires par ses enfants, ignorer deux fois par Wendy quand il lui parle, se blesse sous l'indifférence totale de sa famille indifférente qui préfère se soucier du chien et se fait complètement oublier par ses enfants quand ils sont au Pays Imaginaire (Wendy chantant une chanson sur les mamans et Michel réclamant uniquement sa mère), tandis que l'autre se fait couper la main par un gamin à cause duquel il se fait régulièrement harceler par un crocodile.

Et j'aime bien le personnage de Clochette, mais je ne comprends pas toujours pas pourquoi on a pris une tueuse narcissique et traîtresse comme icône de disney.


Et évidemment, le film a assez mal vieilli, avec sa représentation raciste des indiens (qui a suscité des polémiques à l'époque, d'où l'absence des indiens dans "Peter Pan 2"), Jean étant à peine arrivé au Pays Imaginaire qu'il veut carrément coloniser les indiens (c'est montré explicitement dans le film, il tient à peu près les mêmes propos que Ratcliffe dans "Pocahontas" si vous écoutez bien quand il étudie les traces de pas et qu'il se fait encercler par les indiens cachés dans des sapins) l'omniprésence de la musique à chaque situation (comme c'était spécifique aux dessins animés de disney environ jusqu'à la mort de Walt Disney), la représentation peu flatteuse des femmes, etc...

Et sur la carte que regarde Crochet pendant sa première apparition, on voit l’île des cannibales, avec une caricature de noir aux grosses lèvres !


Si je dois trouver d'autres choses à redire sur ce film, c'est que certaines questions peuvent être soulevées par le film (par exemple, pourquoi Crochet n'utilise pas son pistolet pour tuer le crocodile ou Peter alors qu'il l'a utilisé pour abattre le pirate Skylights qui chantait au début du film), certaines facilités scénaristiques (par exemple, Peter et Clochette qui survivent à la bombe sans une égratignure) le manque de développement (Peter décide d'un coup comme ça de ramener Wendy et ses frères chez eux, sans qu'on montre ce qui l'a amené à décider ça, sans aucune transition), et il y a Michel qui change de tête soudainement quand Wendy lui chante "le besoin d'aimer" et qu'il réclame sa mère.


Et ça m'a vraiment choqué d'entendre Wendy dire à la fin que Peter était "le plus merveilleux de tous" sous-prétexte qu'il les a sauvés de Crochet, comme si elle avait oublié qu'il l'avait laissé tomber à plusieurs reprises et qu'il a laissé les sirènes essayer de la noyer.


Il faut aussi saluer la VF pour avoir fait l'effort de faire revenir Jean-Henri Chambois sur Crochet (et Georges Darling), qu'il avait déjà doublé dans le premier doublage de 1953 et dont le retour sur la 2ème VF était presque aussi inespéré que celui de Georges Aminel sur Dark Vador dans "Star Wars épisode 3 : la revanche des Sith". Les deux comédiens étaient en effet à la retraite quand ils ont été rappelés et c'était leur dernier doublage avant leur décès. Et franchement, je pense qu'il n'y avait pas meilleur choix que Teddy Bilis sur Monsieur Mouche ou Hervé Rey sur Peter Pan.


Bref, c'est un sympathique film d'animation de mon enfance malgré le côté "politiquement incorrect" qui ne passerait plus de nos jours, et qui est tellement surprenant dans l'utilisation d'un héros irrespectueux, sexiste et égocentrique qui passe d'une fille à l'autre et dans son accumulation nonchalantes de tentatives de meurtre, qu'il est très drôle à regarder avec le recul quand on est adulte !

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le 22 avr. 2023

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