Tension palpable et fil de rasoir

La guerre froide. Difficile pour ceux qui comme moi sont nés après la fin de l'URSS de se rendre compte du climat de tension qui régnait alors sur le monde durant ce conflit américano-soviétique. Alors certes des connaissances, on peut en avoir des tas: connaître les dates, les lieux, voir même des anecdotes précises pour les plus passionnés d'entre nous. Mais l'évidence est que nous ne l'avons pas vécu. Force est de constater que le voyage dans le temps n'est pas encore au point, il va falloir se contenter de se raccrocher aux traces que nous a laissé le passé. Et ça tombe bien parce que outre les supports papiers, un film attire notre attention aujourd'hui. Un film c'est convivial, c'est moins barbant souvent que les récits historiques, et puis c'est pas un documentaire froid, y'a une histoire, de l'action et tout ! Mais si on ne se contente pas de voir l'aspect sympathique du média qu'est le film, il faut aussi se rendre à l'évidence que le support vidéo a un autre avantage considérable: permettre de transmettre des émotions, des sentiments à travers tout nos sens.

Ce film n'est en aucun cas un biopic, vous n'allez pas revivre un passage de la guerre froide, retraçant à la lettre les événements de la vie de William Mc Machin, militaire haut-gradé de l'armée de "Insérer nom de ville américaine connue" durant la guerre froide. Non. Tout ce qui se passe dans ce film n'est jamais arrivé (Pour ceux qui ont vu le film et qui sont normalement constitués, vous vous dites "Fort heureusement" en lisant cette phrase). Mais alors, comment une fiction peut-elle (à mon sens) supplanter nos bons livres d'histoires ? Attention, ne voyez aucun mal à ce que je viens de dire. Les cours d'histoire j'ai bien aimé ça, c'est important ne serais-ce que pour votre culture générale, et pour éviter que le passé tombe dans l'oubli. Mais recopier des pages de cours sur la baie des Cochons ne m'a pas forcement marqué ! Ce que je veux dire c'est que ce film essaye de nous faire partager la tension qu'ont pu vivre les gens à cette époque, et il le fait à la perfection.

Pour ceux qui connaissent leur cours d'histoire sur le bouts des ongles, je vais vous poser une question: "durant la guerre froide, à quelle date est associée le jour où Moscou et New York ont été ravagé par la bombe H?" Vous séchez? C'est normal, ça n'est jamais arrivé. Et bien dans Fail Safe, si. Suite à une panne du réseau électrique dans le matériel hyper high-tech (pour l'époque) de l'armée américaine, un ordre de mission est donné par erreur à un escadron de ricains. L'ordre est clair: lâcher la bombe nucléaire sur la capitale ennemie, Moscou. Manque de pot impossible d'annuler cet ordre, car les protocoles sont strictes: les pilotes n'ont pas le droit d'annuler l'opération une fois celle-ci lancée. Alors que faire? Que faire sachant qu'on ne peut rien faire? Et bien rien. On tente des choses inespérées dans l'espoir de pouvoir contrer la fatalité du destin, afin d'essayer de saisir l'infime chance qu'il reste de vaincre ce dernier... mais rien n'y fait.

Lorsqu'on lance Fail Safe, dès les premières images du film, on comprends qu'on est pas là pour rigoler, que ce film est à prendre avec un certain sérieux. On assiste d'ailleurs en scène d'introduction à un cauchemar perturbant d'une corrida. Puis se lance ce que je vais considérer comme la première partie du film. Une partie riche en dialogues sur des sujets liés à la guerre bien évidemment: la bombe nucléaire, les stratégies militaires, etc... On apprends également qu'un meeting est annoncé entre les généraux de l'armée américaine et le secrétaire d'état sur la question de l'utilisation ou non de la force dans cette guerre. Indispensable pour le déroulement du film, mais surtout très intéressant en soi. Puis vient l'élément perturbateur du film, qui vient grossièrement mettre fin à cette partie, certes déjà riche en tension (de par la divergence de point de vue de chaque hommes présents), l'annonce de l'horreur qui se prépare à arriver. Tous les hauts dignitaires sont au courant désormais, une attaque a été lancée par erreur sur la capitale ennemie. Commence ainsi la douloureuse deuxième partie, où la puissance de l'Homme présentée auparavant tombe en éclat. Le constat est alarmant, malgré la force apparente, plus rien n'est possible. La tension ressentie va ainsi gagner en intensité de manière croissante, pour retomber en fracas à la toute fin.

Ce film est donc à la fois une leçon sur la transmission d'émotions mais également une oeuvre dénonciatrice. Il permet de se rendre compte qu'un rien aurait pu bouleverser le passé tel qu'on le connait, que l'inévitable aurait pu se produire, et que les conséquences auraient pu être dramatiques.

Pour finir, le jeu d'acteur est impeccable, et on retrouve avec joie notre méchant cowboy préféré, Henry Fonda, dans le rôle du président américain, qui va avoir la lourde tâche d'annoncer l'horreur à son homologue par le biais du très célèbre Téléphone Rouge et d'un interprète qui pour son premier jour de travail ne va pas chômer...

Fail Safe est avant tout un film incroyable qui mérite d’être vu, que la guerre froide vous intéresse ou non, tant sa puissance est effrayante.

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le 22 déc. 2014

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Psycox

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