Polisse
7.2
Polisse

Film de Maïwenn (2011)

Il m'est difficile de mettre une note à ce film. Je suis très partagé, et une moyenne de 5 serait beaucoup trop neutre pour rendre compte de mes sentiments.

D'abord, c'est un film français. Je ne porte pas en grande estime notre production nationale et quand je vois une oeuvre qui ne me laisse pas indifférent, j'ai envie de marquer le coup, bon sang ! Il y a un vrai sujet, une vraie écriture, un vrai point de vue. Et même si n'on est pas réceptif à la forme, force est de constater que l'empathie fonctionne efficacement comme moteur du récit. On est mal à l'aise quand c'est prévu, on rigole au troisième top et au quatrième on est dégouté. Certainement enfin, les gens moins hermétiques que moi ont put lâcher une larme ou deux.

Le tout est marqué par une esthétique de type documentaire, entrecoupée par des moments plus proches de la série télé. Premier point négatif, les aspects qui relèvent de la fiction pure, de la mise en scène de personnages, d'éléments de narration sont les plus faibles et je ne m'explique pas trop leur utilité dans le propos du film. On n'a pas le temps de s'intéresser aux problèmes de couple de machin, et en même temps d'être réceptifs aux enjeux des enquêtes, fallait faire un film de 3h pour ça.
Du coup, vient vite la question de l'intérêt de cet objet qui se veut cinématographique face à un vrai docu, ou à une série.

La réponse donne quand même raison à Maïwenn, qui utilise son support intelligemment. Et c'est là que je suis le plus partagé. Je m'explique.
Les moments qui me semblent les plus cinématographiquement performants sont aussi les plus crus. Les dispositifs de confrontation ou d'alternance entre agresseurs et victimes, par exemple, grâce à la maitrise du montage et de la mise en scène nous révèlent clairement leurs enjeux, sans ambiguïté. D'ailleurs je pense que la place du spectateur était un problème central à l'écriture du film. Justement à cause de la dureté des faits, il est crucial que notre implication en tant que spectateur soit limitée sans quoi le film devient malhonnête, certains diront immoral. Généralement, c'est le regard d'un des personnages qui nous sert de filtre, et ça marche bien.

Hors voilà qu'à de rares occasions, à des instants courts mais très forts, je n'ai pas senti ce garde fou. Je me suis senti trahi pour la cause du sensationnel ou du pathos. Une micro catastrophe s'opérait devant mes yeux et mes mains se portaient devant ma bouche, pris d'effroi.

L'exemple qui m'a le plus marqué :
C'est un bébé dans les bras de sa mère désespérée, qui pendant une altercation avec un marchand fais tomber le petit par terre. Un plan qui est filmé de loin, à travers le point de vue d'un des personnages, certe, mais cette fois le personnage est témoin, passif, comme nous et non plus une force active du film. Cela nous oblige à nous sur-impliquer dans ce qu'on voit, et là j'aime autant vous dire que j'ai gueulé !

A mon avis, c'est grave, et j'aurais bien mis 3 juste pour ces plans, qui relèvent de la question de l'esthétisation de l'abjecte. Mais voilà on ne peut pas mettre 2 notes sur un même film alors il fallait choisir. Et je suis plutôt enthousiaste devant ce film qui à su éveiller ces questionnements, malgré un apriori plutôt négatif avant de le voir.
ThomasGarnier
7
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le 19 févr. 2013

Critique lue 409 fois

3 j'aime

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