Cours, Kit ! Coooouuuurs !
Amateurs de réalisme et d’effets spéciaux qui claquent, passez votre chemin. Pompéi est un film qui surfe allègrement sur les anachronismes – et qui a l’air de s’en ficher royalement – et qui récolte la palme des images de synthèse les plus mal intégrées du 21ème siècle.
En effet, si je veux bien accepter l’idée que les ombrelles existaient déjà à l’époque romaine, il est risible de voir apparaître des étriers et des harnachements d’attelage de si bonne facture. On est à l’âge du fer, les gars ! Pas de l’acier. Ce genre d’équipement n’avait pas encore vu le jour au moment de l’éruption du Vésuve. Ni ça, ni l’espèce de structure en fibre de bois qu’Atticus se fait un malin plaisir à réduire en bouillie.
A dire vrai, je pourrais passer sur ce genre de petits détails rigolos s’il n’y avait pas ces images de synthèse qui, bien que très belles, sont également très très (mais très) mal insérées dans le décor. Pour tout vous dire, j’ai eu l’impression de voir ces documentaires historiques où, pour mieux illustrer la vie des Pompéiens, on vous présente de jolies modélisations 3D avec des bonhommes sans visage qui se traînent tels des zombies. Eh bien là, nous retrouvons exactement les mêmes graphismes avec de vrais gens qui se baladent tout autour, circulant d’un fond vert à l’autre. Niveau immersion, on a vu beaucoup mieux.
Surtout que les problèmes ne s’arrêtent pas là. Le casting lui-même rajoute une gommette rouge au tableau. Aucun effort n’a été fait pour intégrer les deux stars principales du film au milieu des autres. D’un côté, nous avons Milo le Celte joué par Jon Snow joué par Kit Harington (à croire que HBO a expressément demandé à Paul Anderson de ne surtout pas lui couper les cheveux et lui raser la barbe). Et, de l’autre, nous avons Corvus joué par Jack Bauer joué par Kiefer Sutherland (on lui a juste passé une armure violette et une jupe à frange pour tenter de faire illusion). Il y a bien Carie-Anne Moss qui revient d’entre les morts pour un rôle ma foi transparent mais qui est tout de même à des années lumière de Trinity. Et tout autour, il y a une petite poignée de personnages loin de sortir du lot qui font que, finalement, on ne voit que Snow et Bauer.
En plus, niveau jeu, c’est à l’image du thème du film : catastrophique. Kiefer surjoue à fond. Heureux comme un gamin le jour de son anniversaire, il en fait des caisses pour bien montrer qu’il peut faire autre chose que Jack Bauer qui sauve le monde du nuage de Tchernobyl trente ans après… mais en fait, on n’y croit pas du tout. Kit a les mêmes expressions que dans le Trône de Fer. C’est-à-dire une seule (les abdos ne font pas tout). Emily Browning en a deux, mais avec sa tête de poupée, t’as juste envie de lui coller une fessée et au lit (ça t’apprendra à dire des bêtises !). Et puis les autres font le minimum vital, ils sont juste là pour le chèque à la fin du mois.
Concernant les dialogues, on passe du théâtral ridicule au mièvre dégoulinant, le tout saupoudré de tutoiement à tour de bras qui ne me paraît pas toujours approprié (entre la servante et Cassia, entre Corvus et Cassia). Il y a même des redites, au cas où le spectateur n’aurait pas bien compris la scène qui s’est jouée cinq minutes plus tôt. Bref, rien de bien folichon.
Pour ce qui est du scénario, il est évident que Pompéi n’a été produit et réalisé que pour montrer des scènes de combat à l’arme blanche (glaive, pilum), et quelques castagnes à coup de phalanges, rotules et murs de briques ; avec l’éruption du volcan en fond sonore et lumineux. Ce qui fait que nous avons des personnages qui continuent gentiment à se tailler le lard alors que tout s’effondre autour d’eux, que l’air est empoisonné par les cendres et qu’un raz de marée déferle sur la ville. La logique américaine m’échappera toujours.
Ceci étant, l’éruption est bien amenée et, contrairement aux décors, bien réalisée. Après, si vous êtes capable de mettre de côté toutes les incohérences et les aberrations comportementales de chacun (comme Atticus qui s’arrête brusquement pour vérifier que la vague s’est bien arrêtée derrière lui), vous devriez passer un bon moment.
(Le titre, c’est pour les pointes de vitesse miraculeuses d’Harington qui nous relie l’embarcadère à la villa en une minute chrono. Speedy Gonzales, on l’appelle à Naples.)
PS : j’étais tellement absorbée par les prouesses sportives de Jon Snow que j’en ai oublié que même le doublage est foireux. En effet, en VF, les Pompéiens, pour demander la grâce de Milo et Atticus, s’exclament tous en chœur : « Safe ! ». Somptueux (bon, ça ne vaut pas le « bras » de GI Joe : Conspiration, mais c’est pas mal).