Un couple bourgeois en crise, face à ses propres démons, et aux démons extérieurs. Le dernier film de Reygadas est son plus Bergmanien, mais c'est aussi son plus personnel. L’héroïne est sa femme (je crois), les deux enfants du couple sont les siens (j'en suis sûr) et la belle maison design isolée en plein milieu de la forêt est la sienne (ça aussi). Le film a été présenté à Cannes il y a pile un an. Et depuis, il n'en finit plus de se faire descendre. Cannes, ça peut faire beaucoup de mal à un film. Les spectateurs ont les yeux fatigués, ne dorment pas la nuit, enchainent les films et surtout sont à la recherche du scoop, de la pépite à dénicher, ou du cinéaste à dézinguer. L'an dernier, pas de bol, c'était le tour de Reygadas. On adore ça en France : aduler un type pour mieux le descendre avec force quelques mois plus tard. Pourtant Post Tenebras Lux est un film très beau, que je comparerais (plutôt qu'aux habituels Tarkovski, Weeresathekul et Malick qu'on ne finit plus de lire à son sujet) à l'Antichrist de Lars Von Trier ou au Faust de Sokourov. Comme pour ce dernier, l'ésthetique du film relève du miracle. Un écran qui rappelle les films primitifs, un iris quasi permanent qui floute les contours et produit (enfin) l'effet recherché par tout cinéaste : voir comme voient des yeux, et un travail de photographie absolument dément. Au niveau du fond, le film est aussi fort que Lumière Silencieuse. L'histoire du couple et tout son contexte narratif est fort, très bien narré, de manière assez classique, et elle est entrecoupée, parasitée, d'autres séquences, qui peuvent être des flashes-backs ou tout autre chose... Et c'est généralement très fort, très perturbant. Il y a notamment une incroyable scène érotique dans un sauna échangiste (ou les convives s'expriment en Français) qui est au moins aussi troublant (et plus cru) que la scène du Silencio d'Eyes Wide Shut. Voilà, ce film sera sans doute encore moqué, comme ont été moqués les derniers Bela Tarr sans doute, mais ce n'est pas grave. L'Art et le temps feront le reste. Ce film, ce cinéaste resteront. Les détracteurs et leur bile amère sont déjà oubliés.
FrankyFockers
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le 12 mai 2013

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