Comment avoir raté un plat aussi bon...

Poulet aux prunes, la Bd de l'Assoc, profitait pleinement de l'univers bichromique de Marjane Satrapi, d'un découpage sobre, d'un rythme précis et d'une synthèse efficace (moins de 100 pages de mémoire). Fan de la première heure de ses oeuvres, de Persepolis à Broderies, en passant par la version animée dont je me méfiais avant d'être convaincu par une belle adaptation sur grand écran, je m'apprêtais à passer un bon moment. Alors par où commencer ?
Tout d'abord dès les premières secondes, une chromie flashie, accentuée, mélangée à de faux décors en cartons qui pourraient laisser entendre que nous assistons à un conte (Comment Nasser Ali a t-il pu choisi de se laisser mourir et ensemble de flash-backs qui justifient ce choix) me font dire que la toile de fond est mal choisie.
Mais bon voilà, le conte fait rire, on passe de la bouffonnerie au burlesque, puis on revient au drame, pour revenir à des tableaux humoristiques et cyniques de suicides envisagées; Les enfants, les adultes, les maîtres, la famille sont tour à tour amusants, sérieux, sombres puis bouffons : dans ce conte tout se mélange, les genres, les atmosphères, les faux décors, des mini-histoires (qui elles ne manquent pas d'intérêts), et dans cette surabondance de registres, de procédés, tout est surévalué pour en perdre définitivement une cohérence. Un milk-shake de Wes Anderson, d'Amélie Poulain, de Peur(s) du Noir...
Mais qu'en est-il du récit initial ? La forme détruit le fond. Le traitement de la fiction la rende bidon, le coup de foudre de la belle Irâne, présentée à coups de ralentis (le procédé qui me désespère le plus dans le cinéma pour insister sur la "plastique féminine"), la personne qui joue Azraël semble mal maquillée, le rajeunissement/vieillissement de Nasser-Ali ne fonctionne pas (Il semble presque faire le même âge alors qu'Irâne a prit 40 ans et en 20 ans, est devenue grand-mère sur la même période)...

Il ya un moment où l'esprit vagabonde, ne croit plus tout simplement en l'artifice cinématographique. Le factice l'emporte sur l'illusion. C'est à ce moment là que je dis que la sauce est ratée, que de vouloir trop mélanger les saveurs, l'épicé, le salé le sucré et l'amer, on a un goût sans caractère, qui au lieu de plaire à tous ne contente personne.
Le conte qui est celui d'un homme souffrant de son amour perdu, qui n'aime pas sa femme, ce conte qui aurait pu être immortalisé, intemporalité est devenu faux. Les caricatures ont tué la finesse du récit.

Pourquoi ne pas avoir respecter une bichromie même en film, sans parler d'un retour aux procédés de Persepolis pour respecter cette trame initiale qui ne manque pas d'intérêt. Comment avoir raté un plat aussi bon ?
Ochazuke

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