Découvert enfant sur un bon vieux cube cathodique des familles dans les années 90, recroquevillé de peur contre mon père sur un fauteuil de cuir miteux, ma première vision de Predator fut une expérience très intense... voir traumatisante... mais tellement jouissive... si bien que l'on en parlait souvent tous les deux des années après... (putain ma critique commence vraiment très très mal).


Redécouvert bien plus tard, depuis je me le suis refait un nombre incalculable de fois mais exprimer ce qui me plait autant dans Predator n'est pas forcément évident sans l'emploi non pas abusif mais redondant de superlatifs.
Car au delà du spectacle à la testostérone avec grosses pétoires qui ravit mon cerveau reptilien de mâle, Predator est plus profond que ça et touche aussi à l'intellect à l'instar d'un Conan le Barbare avec lequel il partage de nombreux points communs et parfois les préjugés qui vont avec. Disons simplement que le spectacle et ses thématiques me parle énormément et que devant un pitch au allure de série B, ce fond (la chasse et la prédation, l'instinct de survie, le retour à l'état sauvage) doit tout à la mise en forme de McTiernan au service de son propos qui prouve encore que le plus important n'est pas tant ce que vous raconter que la manière dont vous le faites.


Hemingway disait qu'une fois que vous avez goûter à la chasse à l'homme et l'avez aimée plus rien d'autre n'a de saveur...


Représentants du genre Homo (sapiens hein !) dans ses comportements les plus virils, Dutch et son commando, parés de tous les attributs des grands mâles belliqueux modernes, soit la technologie et le savoir-faire pour raccourcir l'espérance de vie de leurs congénères, se retrouvent plongés au cœur de la jungle, l'un des environnement terrestre les plus inhospitalier et impitoyable où la concurrence, les modes d'adaptations et les prédations entre espèces sont parmi les plus intenses (si on met de coté le milieu aquatique et la bourse). Et après avoir fait une démonstration de leurs talents, ces action-men en chair et en os vont bientôt être confrontés à une menace supérieure dans la chaîne de prédation*.


Et McTiernan sait comment tirer parti de cet environnement surchargé où l'identification visuelle n'est pas simple et où jungle et créature vont se fondre et se confondre : d'abord par des plans dans les arbres sur "rien" avec musique aux accents tribaux puis carrément en mettant sa menace dans le champ alors qu'elle est invisible jusqu'à nous laisser entrevoir le mimétisme qu'elle crée avec cet environnement.
Travelling ou surgissement d'information dans un même plan, mise au point et jeu sur la focale, McTiernan joue constamment avec notre vision dans cet environnement foisonnant sur ce que l'on distingue ou ce que l'on croit voir (ne vous étonner plus de comment surviennent certains accident de chasse en milieu boisé), en y allant progressivement dans sa technique donc, ce qui fait naître une tension tout au long du métrage où le moindre craquement nous tiens en alerte et peut devenir une menace pour le groupe.
Tous ces artifices font apparaître le Prédateur comme un esprit, une force surnaturelle de la jungle, comme peuvent l'avoir été certains carnivores aux yeux de cultures "primitives" où l'homme était un gibier comme un autre, prédateurs eux aussi bien équipés pour se fondre dans leur environnement, suscitant la peur des hommes devant quelque chose qu'ils n'expliquaient pas.


Mais force de raison, Dutch va découvrir qu'ils ont bien affaire à un être de chair et de sang...


Et comme certains mode de chasse depuis des temps immémoriaux les hommes vont devoir s'entraider et ruser pour survivre (notamment le piégeage). Et on va s'y attacher à ces hommes car au delà de leurs fortes personnalités viriles et machistes (comme à un mauvais rendez-vous de chasse) transparaît un peu d'humanité face à l'adversité (Dutch qui déteste faire ce type de boulot, Mac attaché à Blain (héhé) ou Dillon qui prouve qu'il n'est pas qu'une pourriture. J'aime aussi particulièrement le personnage de Billy (premier à se dépouiller de ses artifices de guerrier moderne et annonçant le "retour à la sauvagerie" qui va suivre) et voir certains amérindiens pister des animaux ou faire une recherche au sang m'ont prouver que Billy n'est pas que dans Predator.
Bref autant d'éléments essentiels ou les membres ne sont pas des faire-valoir dans cette chasse aux trophées en se faisant tuer bêtement et renforce l'implication émotionnelle lors de l'affrontement final.


Car après une bonne course d'épuisement (technique de chasse reconnue) où Predator finit d'achever les derniers représentants du groupe, Schwarzy adopte par chance une adaptation naturelle mimétique face à celle technologique de son adversaire après "une sortie des eaux" face à un arbre gigantesque (où j'y vois donc même un symbolisme lié à la conquête des continents par le vivant, même si j'abuse peut-être) et va se retrouver seul avec sa bite et son couteau, devoir utiliser ses dernières ressources et notamment sa cervelle pour survivre.


McTiernan nous offre une dernière partie quasi muette que j’appellerai "le retour à la sauvagerie" où l'homme dépouillé des armes issus de sa technologie avancée provenant de son monde "civilisé" redevient face à la menace de la mort l'être primitif de l'âge de pierre qui a su prendre l'ascendant sur des créatures bien plus grosses et fortes que lui.
Et non pas grâce à sa force donc mais surtout et essentiellement par son intelligence et sa ruse, lui permettant de créer les premières armes, des pièges et de duper ses proies.
Et on nous offre un plan à la symbolique chargée où la plastique du chêne autrichien couverte de boue nous offre une vision du genre Homo dans son état le plus primitif, porteur du feu et poussant son crie bestial en signe de défi où l'homme revendique son statut de prédateur ultime de la planète !
(oui parce que à ce stade Schwarzy aurait pu perdre ses boules et prendre ses jambes à son cou).


Face au challenger, s'engage alors un combat final mythique, de cache-cache et de ruse qui commence dans les arbres, environnement originel de nos lointains ancêtres, jusqu'à se poursuivre à même une grotte, avant de revenir au milieu aquatique. Le Predator impressionné par l'intelligence de cet hominidé se dépouillera alors lui aussi de ses artifices engageant un affrontement de force brute à la loyale entre espèce où il pensera surement dominer un Schwarzy qui parait pour le coup bien riquiqui. Et pour sûr, ce dernier va se faire bien étaler...
Mais face à la force brute c'était sans compter sur l'intelligence humaine encore une fois que Predator va se faire avoir par une bonne vielle ruse.


Alors c'est qui le prédateur ultime sur Terre ?!


Qu'en on voit la tête de notre Schwarzy sur le plan final en mode syndrome post-traumatique, il y a bien de quoi réfléchir sur notre propre nature...


*pas envie de faire un débat sur l'emploi du terme comme le dernier volet en date, disons simplement qu'une chasse, quelle que soit la motivation initiale et sa finalité (alimentaire ou non), fait intervenir les mêmes mécanismes, que l'on appelle ça instinct de chasse ou de prédation.

Altharil
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le 14 févr. 2019

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Altharil

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