Un film très court et efficace mais qui sacrifie sa réussite dramatique et sociale pour un suspense

On avait laissé la réalisatrice Emmanuelle Cuau il y a déjà dix ans avec l’excellent thriller sociétal « Très bien, merci » qui proposait, à travers un cas banal, de décortiquer les aberrations de notre système administratif et social sous forme de suspense. Un engrenage implacable que l’on retrouve ici au début de « Pris de court » qui prend à la fois et successivement la forme d’un drame social et familial puis d’un polar. L’étau qui se resserre contre le personnage principal est une nouvelle fois au centre du cinéma de Cuau. On y retrouve d’ailleurs Gilbert Melki dans un second rôle de gangster, lui qui jouait le personnage principal du film pré-cité.


Virginie Efira, qui se frotte décidément à tous les genres avec une aisance folle, nous prouve qu’elle est encore une fois une tête d’affiche probante au jeu impeccable et juste. Les enfants choisis pour lui donner la réplique ne sont pas en reste et montrent que l’étape du casting fut judicieuse pour un rendu homogène. Cela permet en effet de croire à ce cocon familial à trois, ce qui implique une empathie maximale envers les personnages. De la même manière, l’aspect très réaliste du long-métrage est réussi et la réalisatrice sait poser un contexte vite et bien. Que ce soit au niveau social (fins de mois difficile), moral (l’engrenage du mensonge) ou du suspense (glissement vers le film de braquage), il n’y a aucune longueur ou baisse de rythme, la courte durée du film n’étant pas un frein mais au contraire un gage d’efficacité.


Cependant, « Pris de court » souffre peut-être d’un manque d’enjeux et d’ampleur qui rend sa facture cinématographique très vite anodine et triviale. Le choix de délaisser l’aspect social comme la piste du mensonge aux enfants, de manière à se focaliser sur les contours d’un polar à la limite du film noir, n’est pas forcément la meilleure des idées. Au contraire, cela replace cette œuvre dans une veine plus classique et balisée, au détriment de la situation familiale des protagonistes et de leurs relations, qui s’avère pourtant l’aspect le plus réussi du film. En résulte, certes un beau drame familial mais assorti d’un tout petit thriller anecdotique.

JorikVesperhaven
6

Créée

le 30 mars 2017

Critique lue 678 fois

Rémy Fiers

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