• Revu en mars 2014 (-1 point) :
Ce n'est peut-être pas un prequel à Alien, mais sur 70% de Prometheus, on croirait être devant un remake. On profite alors d'une photographie et réalisation haut de gamme qui nous offrent toute une imagerie dantesque, à la fois terrifiante et fascinante. Les paysages monochromatiques sont d'ailleurs somptueux. Toutefois, passées la mise en contexte et l'arrivée de l'équipage sur cette planète extra-terrestre qui nous fait redécouvrir tout un univers familier, le film perd considérablement en rythme, puis en intérêt. Il a beau poser d'excellents thèmes et concepts métaphysiques, philosophiques, mystiques, façon Mission To Mars, ils ne restent qu'effleurés sans jamais être approfondis (hors scènes coupées). Néanmoins, le vrai problème c'est, non pas cette flûte ou cette course rectiligne, mais bel et bien son manque flagrant de mystère. Les Ingénieurs qui sont dévoilés dès les premières secondes auraient pu être le point d'orgue du film, tout comme le suspens annulé par leurs hologrammes passés. Pourtant, l'ambiance est là, tout comme la musique, sombre et inquiétante, mais il n'y a rien qui cultive la curiosité et l'effroi de la situation.




• Critique du 12 juin 2012 :
Alien, Le Huitième Passager, est sorti en 1979. À cette époque, Ridley Scott n'avait qu'un film historique comme bagage, et tout le mal du monde, vis-à-vis des studios, à pouvoir concrétiser toutes ses idées dans ce film d'épouvante aux confins de l'espace. Ce qui dérangeait, c'était le design sinistre, bio-mécanique, et érotique de H.R. Giger, ainsi que la construction d'énormes plateaux, très chers, comme celui du "Space Jockey", la créature colossale retrouvée à l'état de carcasse derrière ce qui semble être un télescope. Alien, premier du nom, de par son atmosphère unique, et son bestiaire, a marqué à jamais le paysage de la science-fiction, et est désormais considéré comme chef-d'œuvre intemporel.


Dans ses nombreuses suites, les réalisateurs se sont toujours focalisés sur le xénomorphe, alors que, depuis 33 ans Scott a toujours été sidéré que personne ne se penche sur le plus gros mystère du film : que sont les "Space Jockeys" ? C'est de là qu'est parti le développement de Prometheus. À la base prévu comme prequel en 2 volets d'Alien, le projet s'est rapidement transformé en film plus indépendant, qui se passe dans le même univers qu'Alien, mais y est bien moins connecté. En effet, l'histoire n'est alors plus confinée par une suite connue depuis 33 ans, et peut ainsi évoluer plus librement et aborder des thèmes différents


Ridley Scott est un de ces réalisateurs hautement estimés, avec lequel tous les acteurs ont eu un jour envie de travailler. Du coup, il n'a eu aucun mal à rassembler un casting cinq étoiles, de l'envergure de l'odyssée spatiale qu'il envisageait de tourner.


L'on retrouve alors le très bankable Idris Elba, enchaînant les blockbusters, en tant que capitaine du vaisseau "Prometheus". Un capitaine très cool, qui rappelle par moment l'attitude de Yaphet Kotto dans Alien. Michael Fassbender qui est, lui aussi, absolument partout depuis quelques temps, confirme son statut d'un des plus grands acteurs de sa génération. Il joue David, un androïde, et parvient à retranscrire avec brio la rigidité relative des articulations de la machine, ainsi que la froideur de ses expressions et son impassibilité. Une très belle performance à laquelle fait écho celle de Charlize Theron. Encore une actrice de talent, qui campe ici une sorte de bureaucrate impassible qui cherche à tout contrôler pour finalement révéler ses intentions au fur et à mesure que la situation lui échappe. Guy Pearce apparaît, quant à lui, totalement maquillé en personne âgée. C'est crédible, mais le fait de reconnaître clairement les traits de l'acteur laisse une certaine confusion, il aurait été plus judicieux d'engager une vrai senior.


Enfin, le dernier gros nom du casting va à la star montante depuis la version suédoise de Millenium : Noomi Rapace. La Suédoise enfile les bottes de la protagoniste, l'héroïne du film qui, très croyante au début du film, va très vite être tiraillée entre sa foi et ses découvertes scientifiques, pour ensuite devenir une femme forte comme l'a pu être Sigourney Weaver dans le rôle d'Ellen Ripley, 33 ans auparavant. Si les deux femmes n'ont pas le même développement mental de leurs personnages, il est impossible de nier leurs ressemblances extérieures ainsi que leurs actions entreprises.


Reste quelques seconds rôles comme Logan Marshall-Green, Emun Elliott, Patrick Wilson, ou Benedict Wong (notamment présent dans Sunshine). Tous les acteurs jouent très bien, même si Fassbender est celui qui se montre le plus remarquable. Toutefois, l'on peut noter des émotions surjouées (du côté de Rapace principalement), ainsi que quelques autres passages moins convaincants (les deux scientifiques perdus). Et ce n'est pas faute d'avoir des dialogues soignés, et habilement structurés.


Par contre, je n'arrive pas à comprendre ceux qui fustigent le scénario de toutes parts. Malgré plusieurs facilités notoires ou pas indispensables (David qui fait fonctionner tous les mécanismes des Ingénieurs, les hologrammes de cette race qui servent d'explication plutôt que de laisser une part de mystère, l'histoire avec le père, à titre d'exemple), l'intrigue reste sur une trame de science-fiction et, plus précisément, de planet opera classique. Prenez des films érigés désormais comme cultes, tels que le tout premier du genre, Planète Interdite, ou même Alien (dont toute la première moitié de Prometheus semble en être un remake), et vous retrouverez le même type d'histoire. Une équipe de scientifiques, ou autres, part en mission sur une autre planète, ils explorent et, pour qu'il y ait de l'intérêt, ils y découvrent quelque chose. Le point qui me dérange principalement est simplement de nous avoir "tout" dévoilé dès la scène d'introduction, alors que si elle avait été enlevée du montage, le mystère des découvertes n'en aurait été que plus grand et impressionnant.


Dans Prometheus, ce sont les Ingénieurs qui sont découverts, et soulèvent alors des questions quand à la création de l'Homme, leurs intentions dans cette manœuvre et les dispositions que cette race, qui devient alors assimilable à Dieu, a à notre égard. Des questions qui ne seront pas toutes répondues dans ce film puisque Ridley a toujours pensé cette histoire en deux volets, et laisseront donc travailler l'imagination de chacun jusqu'à ce qu'une suite voit le jour. Il est vrai, toutefois, que face à des thèmes aussi riches qui empruntent à la religion et la métaphysique, tout en couvrant un large domaine des principaux fondements de la science-fiction, l'on s'attendait à davantage de grandeur émanant du long-métrage, comme l'on pouvait la ressentir devant les bandes-annonces.


Et pourtant, le film dispose d'une ambiance rare, unique même, qui lui permet de se démarquer sans mal de tous ceux du genre. La réalisation léchée de Mr. Scott, ses scènes contemplatives et plans rapprochés intimistes, ses travellings inventifs et l'action toujours capturée du meilleur angle qui soit permettent de rendre pleinement compte de l'atmosphère froide, désolée qui règne sur la lune LV-223. La photographie est splendide et habille les images de tons blancs et gris austères. Et à l'intérieur des structures extraterrestres, c'est la vision de Giger qui est restaurée, avec de nombreuses parois utérines sépulcrales, et des décors dans la veine des œuvres de l'artiste suisse. Seul bémol, même au sein de ces cavités alien, l'on ne ressent pas l'effroi, l'angoisse, qu'était capable de procurer l'expédition en lieux similaires dans le premier Alien. Sans doute que le fait que tout soit un peu trop propre, lisse, et esthétiquement classieux y joue en partie.


Par ailleurs, l'atmosphère gagne en richesse grâce au travail minutieux des designers qui sont parvenus à recréer un univers bien particulier, anticipant son aspect d'après les ruines découvertes dans le film de 1979. La véritable apparence des Ingénieurs, d'albâtre sous leurs combinaison biomécaniques viscérales, emprunte fortement aux sculptures de Michel-Ange (notamment à David) et offre à ces premiers "hommes" un charisme inné respectable. La minimisation de l'emploi de CGI pour les Ingénieurs et les vaisseaux, et de matte paintings pour les décors, participe grandement au réalisme de l'œuvre. De nombreux grands artistes de science-fiction ont également servi d'inspiration aux décorateurs pour créer les environnements spatiaux, ainsi que ceux de l'astre de destination. Autant dire que l'aspect visuel du film est d'une richesse incroyable. Les couloirs du vaisseau sont également peaufinés à l'extrême ; sobres, modernes, ils conservent aussi un style assez retro dans leur design. Quant à la technologie en place, les écrans et hologrammes nimbent les pièces ; un des plans les plus grandioses restant assurément la vue du cockpit, ou la carte stellaire déployée par les Ingénieurs dans leur salle circulaire.


Oui, le film est jonché d'effets, à vrai dire il y en a dans la moitié des plans. Et leur grande force est qu'ils s'insèrent discrètement au sein des images, et ne sont pas du tout tape-à-l'œil, ils se contentent de sublimer les paysages, d'approfondir les atmosphères, de rendre la technologie futuriste fonctionnelle, et participent à la beauté des images. D'ailleurs, les premières minutes du film rappellent indéniablement quelques séquences de The Tree Of Life, dans leur présentation. Les effets spéciaux de Prometheus, même les plus gros, sont totalement crédibles, du fait d'un fort usage d'effets pratiques, dans un premier temps, avec la construction de plateaux démesurés pour tourner les scènes, que ce soit en extérieur, ou en intérieur, mais aussi d'un travail numérique minutieux qui finit d'enjoliver le tout.


Enfin, Marc Streitenfeld, toujours fidèle à Ridley Scott, fait cohabiter une excellente bande-son avec l'ambiance inhospitalière de la planète explorée. Le compositeur allemand crée ainsi des plages musicales minimalistes, parfois bruitistes, construisant des atmosphères intrigantes, troublantes, et menaçantes. S'il part quelques fois trop du côté du fantastique, ou de l'émerveillement pour ce genre de film, il parvient néanmoins à créer un thème récurrent, aidé d'un merveilleux leitmotiv de Harry Gregson-Williams, et quelques sonorités empruntées à Jerry Goldsmith, compositeur de la bande-son d'Alien.


D'ailleurs, l'approche musicale de Marc est demeurée très typique des films d'épouvante des années 80. Employant un orchestre classique, il joue essentiellement sur les tonalités basses (plus quelques chœurs féminins mystiques) pour bâtir les ambiances irréelles, et fait s'agiter cordes frottées et notes de piano cinglantes sur les passages agités. Étonnamment, l'ensemble est loin de sonner kitsch, et s'harmonise facilement avec le visuel. Et si la musique de Prometheus génère une ambiance si spéciale, c'est parce que le compositeur a fait jouer son orchestre à l'envers, pour ensuite inverser les phrases musicales informatiquement. Un procédé curieux, mais qui fait indubitablement son effet.


[Critique 3D]
En ce qui concerne la 3D, elle a été obtenue grâce aux dernières caméras du marché, et le résultat est absolument somptueux. Précisons que j'étais dans une salle propice en tous points à un visionnage de haute qualité, avec l'écran occupant tout le champ de vision et, donc, une immersion totale. Dans Prometheus, il y a cette sensation permanente, dès les premiers plans, d'être devant une fenêtre donnant directement sur le film, avec tous les éléments, et acteurs, semblant ridiculement à portée de main - saisissant sur la séquence des caissons de sommeil cryogénique des Ingénieurs. Le relief est soigné, hautement maîtrisé, et la profondeur sublime. Les scènes spatiales affichent un vide sidéral vertigineux (le passage à proximité de l'anneau d'un astre), et le rendu des différents hologrammes est plus réaliste que jamais. Il demeure quelques légers flous sur les mouvements trop brusques mais, à mon avis, seul Peter Jackson, avec Le Hobbit en 48 fps aura sûrement une chance de passer outre ce point. Quoi qu'il en soit, Prometheus s'orne assurément d'une des plus belles 3D - sujette à la contemplation - depuis Avatar. J'irai même jusqu'à dire que, le film ayant été pensé de cette manière (les prises de vue s'en ressentent), il est primordial de le voir dans ce format. Ayant eu l'occasion de le revoir en "2D", l'atmosphère apparaît bien moins prenante, envahissante, que lors de la version relief et l'intérêt s'en trouve diminué.
[Fin critique 3D]


Prometheus n'est finalement pas le film transcendant auquel je m'attendais, et ne rejoindra donc pas les pièces maîtresses de mon podium personnel, alors que je l'en pensais capable. Pour autant, je n'en ai pas été déçu. Ridley Scott revient à ses premiers amours cinématographiques, avec pour ambition de chambouler, une nouvelle fois le cinéma du genre. Difficile de dire s'il y arrivera et si son film s'imposera à nouveau comme référence de la science-fiction du 7ème art ; il n'en reste qu'il présente tout de même un long-métrage de qualité aux idées réfléchies. Son œuvre est orchestrée de main de maître, et il construit alors une fresque spatiale captivante, et visuellement époustouflante, qui peut se targuer d'avoir acquis une identité propre. Prometheus est donc un film de SF solide, qui parvient à raviver la mythologie de l'univers d'Alien, tout en en créant une nouvelle, des plus prometteuses.

AntoineRA
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le 12 juin 2012

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AntoineRA

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