Si Nicolas Winding Refn est aujourd’hui un formaliste total, plaçant l’esthétique en valeur suprême de son cinéma, et ce depuis Drive, il n’en a pas toujours été ainsi. En effet, il est difficile au premier abord, de voir le style Refn dans Pusher, son premier long-métrage. La caméra est embarquée, mouvante, l’image est sale, à l’image de ce qu’elle montre, et l’on n’a pas encore de surenchère gore comme cela arrivera par la suite. Pourtant, on retrouve déjà dans l’écriture certains gimmicks du danois, qu’il s’agisse de la très grande vulgarité des dialogues (Mads Mikkelsen est flamboyant, d’ailleurs, pour le peu de temps d’écran qu’il a), de la misanthropie galopante (tous les personnages sont infâmes), ou encore de l’inéluctabilité tragique au bout du tunnel (la toute fin du film, ouverte, où Frank s’imagine ses poursuivants se préparant à l’abattre). Car dès son premier long, Refn est déjà dans la maîtrise de son art, et le style néon de Drive se retrouve déjà dans les scènes de boîte de nuit, en particulier la dernière, avec son électro planante qui semble préfigurer le Nightcall de Kavinsky. Mais en attendant les errances nocturnes de Ryan Gosling, regardons ce microcosme vivre, enfin plutôt tenter de survivre, dans cette course désespérée pour éponger ses dettes, qui n’aura jamais d’autre issue que celle, macabre, de la tragédie.