Une période sombre de l'Histoire de France où à peine sortie de la 2ème Guerre Mondiale, la France se trouve à gérer des conflits de décolonisation en Indochine puis en Algérie.
Le film d'Yves Boisset ne porte pas de jugement sur les faits historiques et ne s'intéresse pas au bienfondé ou non de la guerre d'Algérie. Le film s'intéresse surtout au sort de quelques soldats réservistes et appelés qui furent considérés insoumis au moment de leur incorporation et lors de l'émeute organisée par des civils dans une gare lors de leur transfert vers l'Algérie.
Le grand intérêt du film est l'analyse rigoureuse des comportements des militaires engagés (sous-officiers et officiers) sur le terrain face à ces soldats ou pacifistes ou insoumis ou réfractaires.
Comme Yves Boisset l'exprime dans l'interview du bonus du DVD, le film n'est pas tant un film antimilitariste qu'un film contre les abus de pouvoir. Et ces abus de pouvoir sont de plusieurs ordres : l'humiliation des soldats par la hiérarchie du régiment disciplinaire lors des exercices poussés avec les brutales punitions individuelles ou collectives, les pompes "c'est la vie de château, merci, mon adjudant-chef" et les méthodes, inadmissibles, d'obtention des renseignements au moyen de la torture.
Comme Boisset le montre souvent dans ses autres films ("L'attentat", "Le prix du danger", "Allons z'enfants"), il décrit la révolte de ses héros contre ces injustices ou ces abus de pouvoir qui ne pourront se faire entendre et qui seront finalement broyés.
Cela n'empêchera pas Yves Boisset d'avoir moult ennuis et insultes de la part des éléments d'extrême droite, des nostalgiques de l'OAS et de l'Algérie Française lors du tournage et de sa sortie en salle…
La mise en scène est très réussie, la photographie des paysages nord-africains (Tunisie) magnifique.
Mais c'est l'interprétation qui est vraiment excellente et convaincante dans ce film.
Le groupe des insoumis ou réfractaires avec Jacques Weber (le communiste contre cette guerre), Jacques Spiesser (le caporal pacifiste), Jean-François Balmer (l'anarchiste) et un tout jeune Jacques Villeret (le bon vivant) recouvrant une panoplie d'opinions diverses. Une mention particulière pour Jacques Chailleux (les valseuses, Dupont-Lajoie) que j'aime bien trouver et dont je ne me souviens jamais de son nom…
La hiérarchie du régiment disciplinaire avec les pervers, alcooliques, drogués Michel Peyrelon, Claude Brosset et Roland Blanche.
La hiérarchie du régiment qui remettra la compagnie disciplinaire dans l'ordre avec Philippe Leroy-Beaulieu, dans le rôle du commandant Lecoq, inspiré du très réel ancien militaire (Indochine, Algérie) Jean Pouget et Jean-Pierre Castaldi dans le rôle d'un sous-off.
Pour finir, RAS est sûrement un des meilleurs films d'Yves Boisset, efficace et sincère.
Sans oublier la très belle chanson du générique "Quand tu seras grand" chantée par Leny Escudero.