"Ramblers" c'est typiquement le genre de film dont je n'attend rien. Un film japonais obscur, réalisé par un metteur en scène prolifique mais dont le travail n'est pas encore très médiatisé en Occident (Nobuhiro Yamashita, connu entre autres pour "Linda Linda Linda"). Adapté d'une bande-dessiné de Yoshiharu Tsuge, "Ramblers" c'est l'histoire de deux cinéastes qui ne se connaissent pas, qui se retrouvent plantés ensemble dans un bled qu'ils ne connaissent pas : leur ami commun, acteur, qui les avaient réunis pour la conception d'un nouveau film, ne s'est pas réveillé à temps pour prendre son bus. C'est sur ce postulat de base que démarre le film.

Difficile quand même de définir "Ramblers" : road movie ? film de potes ? aventure humaine ? comédie noire ? leçon de vie ? C'est un peu tout ça en vérité. Ces deux mecs qui ne se connaissent pas qui vont peu à peu se prendre d'affection l'un pour l'autre, au travers de leur relation avec une mystérieuse inconnue rencontrée au grès d'une sortie à la plage. Dans tous les cas, il est certain que le film ne plaira pas à tout le monde - constitué de longs plans fixes et de rares travellings millimétrés, jouant énormément sur le silence et l'absence de fil narratif défini. J'ai rarement ressenti autant d'empathie pour deux personnages dont je sais pour autant très peu. Le peu de choses qu'on connait des deux mecs qu'on suit tout le film, ce sont les rares informations données au coin d'un dialogue: c'est un peu comme si leur rencontre dans cette ville était l'occasion de se redécouvrir - de repartir à zéro. Et cette construction assez déstabilisant du récit aboutit à un grand moment de cinéma : cette longue scène où les deux compagnons se lancent dans un énorme fou rire dans un hôtel miteux, parce que ce qui est fou, c'est que la scène, mise à part du film, n'est même pas drôle, mais elle agit presque comme une private joke, le genre de fou rire que tu te tapes avec tes potes.

Parce que c'est un peu ça que deviennent les deux protagonistes au terme du film : deux potes. Deux potes de seulement quatre-vingt dix minutes, mais deux amis dont on a du mal à se séparer. On le connait pas, ils ne nous connaissent pas, mais ils sont tout le long du film si proche de nous qu'on aurait presque l'impression qu'ils existent vraiment. Je passerai pour finir très rapidement sur la fantastique mise en scène du film, très simple et sobre mais d'une rare beauté - Yamashita capte le magnifique de cette nature enrayée par l'homme avec une vraie classe. Une belle petite découverte, une petite merveille qui gagne sans doute à être aussi méconnue - on en attend rien, et on se retrouve face à une vraie leçon d'amitié au travers de deux des personnages les plus fascinants que j'ai jamais vu dans un film aussi court.
Vivienn
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le 2 mars 2014

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Vivienn

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