Application SensCritique : Une semaine après sa sortie, on fait le point ici.

Film disgracieux, malin et totalement buvable sans être démonstratif ni réducteur, d'un mauvais goût absolu... Bienvenue dans le grand embouteillage de Federico Fellini : le comique et impertinent Prova d'Orchestra, vrai-faux petit film télévisuel et vrai film d'horreur social en forme de huis-clos foutraque et ouvertement insurrectionnel.


S'inscrivant logiquement dans l'Histoire de son pays ( peu de films auront autant mis en évidence la grandeur et la décadence italiennes que ce Prova d'Orchestra ) Fellini nous pose de plain-pied dans l'intimité-spectacle d'un orchestre symphonique au coeur duquel chaque exécutant y va de sa petite vanité personnelle, dirigé par un chef d'orchestre tyrannique et flanqué d'un syndicaliste présenté sous un jour plus que ridicule... Le tout dans un auditorium n'étant rien de moins qu'un prestigieux monument historique, relique vouée à devenir le théâtre d'un grotesque et gigantesque autodafé puis finalement transformé en un curieux champ de ruines aux résonances fantastiques...


Tout semble ici témoigner d'une société italienne sous le joug d'une haute bourgeoisie allant de paire avec un ordre établi aux allures de fascisme ; une société représentée par un orchestre principalement composé de prolos ordinaires, vulgaires et individualistes ; toisée du regard par un maestro cuistre et conservateur, ayatollah de la grande musique parlant dans un italien tout à fait discutable ; filmée par une télévision complaisante, durant une première demi-heure à travers laquelle rien ne semble jamais dépasser du cadre ni du décor... On se croirait presque dans le cinéma revendicateur de Pier Paolo Pasolini, la satire et le goût prononcé pour les outrances de Federico Fellini en prime.


Sous ses airs de film mineur et informel Prova d'Orchestra va pourtant très loin dans sa charge sociale et politique, surtout lorsqu'on le considère comme ayant été conçu par et pour la télévision ; pratiquement visionnaire si nous l'abordons du regard d'un spectateur d'aujourd'hui ( les années 2010 et l'ère Berlusconi ont effectivement donné raison au potentiel message proposé par le cinéaste ) Prova d'Orchestra est donc une oeuvre bien plus importante qu'elle ne le semble à priori. Un grand film politique.

stebbins
8
Écrit par

Créée

le 25 mai 2020

Critique lue 231 fois

stebbins

Écrit par

Critique lue 231 fois

7
3

D'autres avis sur Répétition d'orchestre

Répétition d'orchestre

Répétition d'orchestre

le 2 nov. 2019

Critique de Répétition d'orchestre par pierrick_D_

Une équipe de télévision se rend dans une église désaffectée pour y filmer les répétitions d'un concert classique.Mais les musiciens,entre désinvolture,manque de motivation et revendications...

Répétition d'orchestre

Répétition d'orchestre

le 25 mai 2020

Métronome, au bûcher !

Film disgracieux, malin et totalement buvable sans être démonstratif ni réducteur, d'un mauvais goût absolu... Bienvenue dans le grand embouteillage de Federico Fellini : le comique et impertinent...

Répétition d'orchestre

Répétition d'orchestre

le 18 sept. 2015

Scherzo grinçant

Ces petites phrases qui passent comme des traits instrumentaux, anecdotes plus ou moins triviales avec petites réflexions sérieuses habilement masquées, emportées dans le flux comique voire...

Du même critique

La Prisonnière du désert

La Prisonnière du désert

le 21 août 2016

Retour au foyer

Précédé de sa réputation de grand classique du western américain La Prisonnière du désert m'a pourtant quasiment laissé de marbre voire pas mal agacé sur la longueur. Vanté par la critique et les...

Hold-Up

Hold-Up

le 14 nov. 2020

Sicko-logique(s) : pansez unique !

Immense sentiment de paradoxe face à cet étrange objet médiatique prenant la forme d'un documentaire pullulant d'intervenants aux intentions et aux discours plus ou moins douteux et/ou fumeux... Sur...

Mascarade

Mascarade

le 4 nov. 2022

La baise des gens

Nice ou l'enfer du jeu de l'amour-propre et du narcissisme... Bedos troque ses bons mots tout en surface pour un cynisme inédit et totalement écoeurrant, livrant avec cette Mascarade son meilleur...