La vérité nuit gravement à la santé.

Lowell Bergman/Al Pacino sortant au ralentit des bureaux de CBS après avoir donné sa démission.
Une quête de vérité.
Jeffrey Wigand/Russell Crowe, impuissant face aux évènements personnels, professionnels et médiatiques qui l'écrasent.
Une quête de justice.
Mike Wallace/Christopher Plummer tentant tant bien que mal de réparer les pots cassés par CBS News.
Une quête d'intégrité.
Le regard furtif, mais au combien révélateur et bouleversant, échangé entre Wigand et ses deux filles, ces dernières le voyant enfin faire éclater la vérité à la télévision, soit l'ultime justificatif de ses actes.
Les plages musicales éthérées et envoûtantes de Pieter Bourke et Lisa Gerrard.
Les 2h30 qui passent comme une lettre à la poste.

Autant de souvenirs prégnants datants de la sortie ciné de "Révélations", premier grand "film classique" de Michael Mann, le plus aboutit, le plus beau, le plus passionnant, le plus parfait de la carrière du réalisateur.

"Révélations" est une leçon de cinéma.
Tout ici touche à la perfection, que ce soit l'écriture, le montage, les cadrages, l'éclairage, la photo, la musique, la direction d'acteurs - exceptionnels au demeurant.
Cet équilibre parfait entre une histoire puissante, ultra-documentée (faits réels oblige) et une mise en scène au diapason représente tout ce qu'on est en droit d'attendre du cinéma américain contemporain.
Michael Mann a depuis longtemps prouvé qu'il en était le leader.

Les trois points névralgiques du film:
- le combat véridique de Jeffrey Wigand pour faire éclater la vérité sur le plus gros scandale de santé publique de l'histoire des USA, et ses conséquences dramatiques - il perdra presque tout en allant au bout de ses convictions.Mais il en ressortira infiniment grandi.
- le combat de Lowell Bergman, laché par ses patrons et collègues de CBS alors qu'il tente par tous les moyens de faire diffuser l'émission "60 Minutes" dans laquelle Wigand est censé tout déballer.
Il finira par démissionner...Après avoir réussi à faire diffuser l'émission non censurée.
- et le combat même de CBS, tiraillée entre la volonté de garder sa crédibilité intacte et la menace de rachat par la compagnie de tabac incriminée dans ce scandale sans précédent.
Le tout bel et bien tiré de faits réels, donc.

La complexité des sujets abordés pourrait égarer le spectateur en cour de route ??
Qu'à cela ne tienne: Mann, en plus de fluidifier au maximum des dialogues (avec l'aide de son fidèle coscénariste Eric Roth) qui auraient facilement pu perdre le spectateur lambda (les nombreux termes juridiques nottament) filmera qui plus est les trois quarts de son énorme "film-enquête-dossier" comme un pur thriller, n'hésitant pas à tricher en dramatisant certains évènements (ces derniers n'en restant pas moins véridiques), ce qui lui permettra de garder le spectateur rivé à son siège, grâce également à un montage éblouissant d'efficacité.

"Révélations" est une démonstration de ce que le cinéma peut délivrer de plus fort lorsque le pouvoir des images est aussi puissant que celui des mots.
Si le mot chef-d'oeuvre a encore un sens...

(Ps: mes deux uniques mauvais souvenirs liés au film concernent la campagne publicitaire française de l'époque, avec cette immonde affiche qui résume si mal le personnage de Pacino, et qui ne donne vraiment pas envie de voir le film, et l'imbécilité pure et simple de l'académie des Oscars, qui ne lui décernera pas la statuette du meilleur réalisateur.)
Sylvinception

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