Si l’on peut regretter de ne pas avoir un spin-off qui fasse office de véritable spin-off, à savoir, un film qui s’émancipe totalement de la chronologie et des personnages des films principaux, au sein d’un récit qui se situe longtemps avant ou après, et pour cause, l’idée est encore une fois de nous balancer à toutes les sauces l’iconographie de la trilogie à travers des projets démagogiques et réactionnaires, puisqu’il n’y a que ça qui plaît visiblement. Le film porte en lui quelques éléments plutôt intéressants.


Rogue One représente une transition, un passage de flambeau entre les deux trilogies. Ce qui se traduit par bien des aspects, comme la caméra Arri Alexa 65, qui est une caméra numérique (prélogie), accouplée à une optique anamorphique (trilogie). L’anamorphique offre un cachet particulier, entre sa profondeur de champ, la déformation engendrée entre les zones nettes et floues lorsque la mise au point passe d'un plan à un autre et les lens flares.


Ça se traduit par les effets spéciaux. Certaines maquettes des vaisseaux utilisées sur la trilogie ont été scannées afin de les recréer le plus fidèlement en image de synthèse (technique utilisée sur L’Attaque des clones pour le champ d’astéroïde de Géonosis, les rochers de L’Empire contre-attaque ont été scannés). De vieilles méthodes, comme les écrans de projection, côtoient d’autres méthodes plus récentes comme la performance capture. La performance capture renvoie à une méthode de travail, à une façon de penser le cinéma très différente et quelque part Rogue One renoue avec une certaine idée de l’expérimentation cher à George Lucas (toute proportion gardée puisqu’il ne va pas aussi loin que d’autres films comme Avatar ou les films de Robert Zemeckis). Ils auraient pu nous présenter Tarkin sous les traits d’un autre acteur avec des prothèses comme dans La Revanche des Sith, mais ils ont pris le risque de proposer le visage du personnage en image de synthèse pour faire revivre Peter Cushing et il n’y a pas plus difficile que de rendre crédible un personnage humain avec le visage d’un véritable acteur.


On retrouve certaines planètes de la prélogie, Coruscant et Mustafar. Des acteurs, Jimmy Smits et Genevieve O’Reilly. Pour ce qui est de la trilogie, Yavin IV et l’Étoile de la mort. Darth Vader, Grand Moff Tarkin et Leia Organa. À noter que le design de la base rebelle semble être plus proche de l’Édition spéciale que de la version cinéma.
Version cinéma
http://i.imgur.com/G4Ghz23.jpg
Édition spéciale (admirez comment George Lucas a défiguré la trilogie...)
http://vignette4.wikia.nocookie.net/starwars/images/9/9d/Yavin_4_Temple.png/revision/latest?cb=20121227220518
Rogue One
http://www.starwars-universe.com/images/actualites/rogueone/ghost2.jpg


Ils n’ont pas oubliés de proposer des environnements inédits comme ceux de Scarif, dont la scène de destruction par l’Étoile de la mort n’est pas sans rappeler les essais nucléaires dans les îles Marshall, ce qui perpétue le parallèle entre l’Étoile de la mort et la bombe nucléaire. Si Jedha s’apparente à Tatooine, les paysages de Tatooine ressemblent plus au "Far West" là où ceux de Jedha ont un aspect plus maghrébin (bien que les scènes sur Tatooine soient tournées en Tunisie).


Et en parlant de nucléaire, notons qu’il en était aussi question dans le Godzilla de Gareth Edwards (même si inhérent à Godzilla j’en conviens). Autre parallèle entre Godzilla et Rogue One,


la mort de la mère, le père absent (Spielberg touch), qui enquête sur l’origine de l’explosion de la centrale nucléaire/qui travaille sur l’Étoile de la mort. La mort du père, le fils/la fille prend la relève (passage de flambeau entre Galen et Jyn), etc.


Le passage de flambeau s’illustre aussi avec la carte contenant les plans de l’Étoile de la mort, qui passe de l’Empire aux Rebelles et littéralement de main en main. Dans l’idée que deux éléments se rejoignent pour créer une transition et former un tout, il y a Jyn qui représente la confiance et Casian l’espoir, l’un va apporter à l’autre ce qui lui manque pour permettre à la mission d’arriver à son terme, ce qui est illustré à l’écran lorsqu’ils se serrent dans les bras. Idem pour Chirrut (croyant)/Baze (non croyant), Bodhi (humain)/K-2SO (inhumain), tout deux ayant quittés l’Empire pour rejoindre la rébellion. Saw Gerrera, représente l’absence de confiance et d’espoir, d’où l’attitude extrême et paranoïaque qui le place en marge de la rébellion. On peut regretter cependant le côté univers étendu inter-dépendant, qui exige de (d’acheter différents produits dérivés) voir The Clone Wars et Rebels pour en savoir plus sur le personnage.


Rogue One c’est également l’occasion de voir les dissonances entre rebelles, certains sont plus extrêmes que d’autres, de même pour l’Empire et la lutte intestine qui anime Krennic et Tarkin. On peut voir l’Empire entretenir un climat d’oppression à travers les camps de travaux ou la propagande dans les rues de Jedha. Il est question de microcosme au service du macrocosme. La famille Erso œuvre pour une cause beaucoup plus vaste comme dans la saga principale où l’on suit les Skywalker qui œuvre pour une cause qui transcende le cercle familial, d’où le point de vu humain, avec différentes échelles de valeurs entre personnages, vaisseaux et décors, ce qui accentue le gigantisme, très bien mis en évidence par la mise en scène de Gareth Edwards.


À défaut d’avoir un véritable spin-off qui s’affranchit totalement de l’histoire et des personnages de la saga principale, le film a au moins le mérite de ne pas trop égratigner le discours de l'opéra en six actes de George Lucas et de proposer par instant, lorsqu’il ne louche pas sur la trilogie, des choses intéressantes qu’on ne voyait pas dans la trilogie.

Teddy_Slamani
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le 27 juil. 2017

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T-S

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