Unique réalisation de Lili Fini Zanuck, femme de Richard D., producteur assez en vue dans les années 1980, lui-même fils de Darry. F, nabab d'Hollywood et fondateur de la Twentieth Century, "Rush", passé déjà inaperçu lors de sa sortie et fatalement un peu oublié participe donc à la grande tradition des films appartenant "au sérail", élaboré avec un savoir faire éprouvé, répondant déjà à l'époque à un formatage marketé et étudié.
De fait, dans ses premières scènes le métrage peine à se défaire des constructions de son époque, notamment celles à l'oeuvre dans le polar, où depuis le nouvel hollywood, le flic fait figure d'anti-héros, développant toute une imagerie gibsonnesque , d'homme faillible, fragilisé par un métier (et parfois une vie privée) difficile, à tendance hystérique et suicidaire. Ajouté à cela une tendance narrative à l'empressement, en vertu de laquelle il devient indispensable de définir les contours de l'intrigue et les protagonistes dans un mouvement rapide, pour s'immerger efficacement au coeur du propos, quitte à emprunter quelques raccourcis et se vautrer dans le lieu commun, et Rush comme les polars de l'époque ébauche en un clin d'oeil, ses antagonistes, Bikers mutiques et patibulaires trafiquants de drogue à la chevelure fournie et longue face à un flic infiltré à l'héroïsme relatif donc, qui choisit pour équipière une jeune policière qui vient de devancer quelques hommes lors d'un sprint. Aussitôt, il lui annonce les codes et enjeux de l'infiltration :
- Seule, avec ton partenaire tu devras te débrouiller
- Ton statut de flic il te faudra oublier en toute circonstance...
- Apprendre à te droguer tu devras (?),
- Car de crédibilité tu devras faire montre quoiqu'il advienne
Rush œuvre donc très tôt dans une certaine caricature, mais ébauche portant très vite également une certaine originalité formelle (le plan séquence d'ouverture, -mais pas que- est confondant de maitrise) et de ton, préférant l'esquisse des contours psychologiques des personnages aux enjeux de l'enquête, creusant la veine profondément dans un premier temps avant d'offrir une multitude de rebonds dans des sous-intrigue et des séquences qui ont le bon goût de ne jamais s'étirer plus qu'il ne faut. Jennifer Jason Leigh et Jason Patrick et dans une moindre mesure Sam Eliott ou Max Perlich donnent une belle profondeur à des personnages qui perdent pied peu à peu dans les enfers artificiels, et dépassés par les enjeux insoupçonnés de l'infiltration et l'influence tentaculaire des trafiquants.
La fin se joue dans une tragédie cruelle,
avec toute la sincérité nécessaire à l'adaptation du roman de Kim Wozencraft, la véritable agente infiltrée,
oeuvre cathartique écrite alors qu'elle était emprisonnée.