Salammbô
5.4
Salammbô

Film de Sergio Grieco (1960)

Quand j'ai lu "Salammbô", j'ai pensé que ce roman avait forcément donné naissance à plein d'adaptations, surtout dans les années 50-60, si avides de péplums. J'imaginais avoir une bonne réserve de films à grands spectacle, pour tous les comparer et finalement élire le plus fidèle à l'oeuvre ; quelle déception de n'en trouver qu'un seul ! (celui de 1925, je ne le compte pas car à cette époque, les moyens manquaient terriblement pour pareille adaptation ; en plus, c'est du muet)


Coup de chance, il est disponible sur youtube, dans une qualité...heu, "impressionniste". Mais si les défauts ne s'arrêtaient que là. Pour commencer, on n'a pas droit à la fameuse scène du banquet ; on démarre directement par les négociations entre les mercenaires et les Carthaginois au sujet de la solde. Et, magie, Narr'havas n'est plus le roi des Numides, il est un responsable carthaginois fourbe. Bon, au moins, les scénaristes avaient retenu que ce n'est pas quelqu'un de follement fiable, puisqu'il trahit les mercenaires en milieu de livre ; toujours ça de gagné.


Ensuite, Salammbô est présentée comme la prêtresse de Tanit, ce qui est un raccourci (elle vénère bcp Tanit, mais son père a toujours refusé qu'elle intègre le collège des prêtresses, parce qu'il voulait la marier), et se met à conclure un pacte avec Mathô (présenté comme un Gaulois...bon, on en est plus là), en donnant des ordres à tout le monde, alors que normalement les limites de son autorité devraient coïncider avec l'enceinte de son temple. Après que Hannon (le rival nul et lépreux d'Hamilcar) ait endossé le rôle de Giscon (un gars intègre), Narr'havas fout des pierres à la place de l'or pour...qu'il y ait un méchant.


Et la guerre commence et Spendius entre en scène, mais se fait colossalement cracher dessus par les scénaristes, puisqu'il devient un pseudo-philosophe au rôle mineur. Et pour bien montrer qu'il est grec, il se balade en toge immaculée... Puisqu'il ne veut pas se salir, il se contente d'indiquer le chemin à Mathô, qui va seul voler le voile et causer avec Salammbô, mais est beaucoup moins respectueusement admiratif que son homologue livresque ; il lui roule un palot alors qu'elle le maudit.


La fameuse scène de la tente est plutôt bien respectée, mais je maintiens que Mathô est trop dominateur, pas assez extasié devant Salammbô. Seulement, la fin de la scène est nulle à pleurer ; le voile est foudroyé, ce qui brise toute potentielle croyance en son pouvoir puisque Carthage va vaincre en son absence. Lors de la bataille finale, Mathô sauve la vie de beau-papa Hamilcar, puis Narr'havas fait le méchant avec Salammbô, mais est surpris par Hamilcar qui l'arrête. Condamné avec Mathô à la lapidation, il crève, mais le mercenaire épouse finalement Salammbô, parce Jacques Sernas est trop beau pour canner.


Et voilà, pas de sacrifice à Moloch (vaguement remplacé par une immolation de vierges peu convaincante), pas d'Hannon, pas d'Hannibal, pas de morts tragiques, pas de fourbe Spendius. Raahh !!!


Pour le reste... Globalement, les costumes manquent de légèreté (les robes de Salammbô ont toujours l'air super épaisses alors que dans le livre elle est souvent vêtue de voiles), mais parfois ne sont pas trop mal. Les scènes de bataille sont terriblement cheap et les mecs sont tous maquillés comme des drag-queens en boîte de nuit. Cependant, Jeanne Valérie est très mignonne et Jacques Sernas est beau gosse, même s'il ne correspond que peu à la description de Mathô. En fait, pour moi, c'est précisément ce côté ridicule, kitch et en pénurie de moyens qui sauve le film. Si c'était une production pharaonique avec un casting de stars, je pense que je le détesterais, mais tel qu'il est, je le trouve chou, un peu comme si c'était un truc amateur.


Si on arrive à le regarder avec des yeux détachés, ce film fait rire, avec son esthétique improbable et son scénario caricatural. (d'où le titre de ma critique)

Créée

le 17 mars 2024

Critique lue 5 fois

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