Quel schmilblick !

Au départ, Philippe Labro est un journaliste qui progressivement s'est essayé à plusieurs autres activités comme la littérature, les médias (présentateur et/ou animateur télé). Il a même été parolier pour des chanteurs (Johnny ou Eddy Mitchell). Mais on le connait surtout pour ses réalisations au cinéma dans divers genres.

Après une vie bien remplie, il vient de quitter ce monde de fous, il y a quelques jours, le 4 juin dernier …

Pour ce qui me concerne, son film phare restera "l'héritier" avec JP Belmondo et Charles Denner. Mais "sans mobile apparent" est un solide polar qui n'est pas à dédaigner.

Le scénario est tiré d'un roman américain "Ten plus one" d'Ed McBain publié en France en 1964 (Série noire Gallimard) que je ne connais pas. Enfin, il s'agit d'une transposition du roman, mettant en scène l'inspecteur Carella comme enquêteur new yorkais dans la série "87° district" à la ville de Nice.

L'inspecteur Carella est confronté à une série de meurtres sur des personnes n'ayant pas de lien entre elles et aura fort à faire pour dénouer ce sac de nœuds d'autant que tout se passe dans la bonne bourgeoisie niçoise où les motifs et les fausses pistes pullulent.

Mais au-delà de l'enquête elle-même, c'est la personnalité du flic qui intrigue le spectateur d'autant que dès le début du film, l'inspecteur Carella multiplie les ambiguïtés (scène du révolver sur le bateau). Son caractère, opiniâtre et ombrageux et son rapport à l'autre manquent singulièrement d'empathie. Si maintenant on dit que l'acteur qui interprète le rôle c'est Jean-Louis Trintignant, alors on conclura que le rôle lui va comme un gant … Là, il excelle avec ses réparties cinglantes que ce soit à d'éventuels suspects, à ses adjoints voire même à sa hiérarchie qui s'impatiente devant l'enquête qui piétine.

Mais l'enquête qui piétine présente aussi un avantage, c'est de nous faire faire une belle balade sous un (chaud) soleil de la ville de Nice qu'on commence à admirer dès le générique avec des vues aériennes de la côte accompagnées par une trompette mystérieuse de la bande originale d'Ennio Morricone.

Dans son enquête, Carella ou Trintignant aura à se confronter à diverses femmes qui en rajoutent un peu sur la nonchalante ambiance qui sied très bien à cette ville méridionale où on penserait plus "vacances" ou "farniente" qu'à des crimes (même très proprement exécutés) … D'abord, il y a l'impassible Carla Gravina qui est la copine du flic et qui semble bien aussi impliquée dans l'affaire. Puis Dominique Sanda qui évolue, avec grâce et sensualité, dans différents registres. Il y a surtout l'étonnante Stéphane Audran dans un court mais marquant rôle où la caméra semble beaucoup plus s'intéresser au pigeonnant décolleté qu'à ce que cette brave dame a à dire…

Et je ne résiste pas à parler aussi de Sacha Distel dans le rôle d'un iso-Guy Lux animant un iso-schmilblick. Ça ne fait en rien avancer l'enquête de Trintignant. En revanche, on profite quelques secondes de Jean-Claude Remoleux, acteur inoubliable chez Mocky, ici, candidat au jeu qui va proposer une grosse ânerie …

Au final, si le film de Labro ne peut pas prétendre à rivaliser avec les atmosphères lourdes des polars de Melville même si ce dernier a appuyé Labro de ses conseils, en revanche, il est un très bon film divertissant avec une belle prestation de Trintignant en flic revêche.