Derrière la polémique presque systématique, on oublie que le cinéma de Paul Verhoeven vient toujours de quelque part. Ainsi, son Benedetta n’avait pas été replacé dans la longue lignée de la nunsploitation à laquelle il appartient pourtant incontestablement. A l’autre bout de cette lignée, il y a Satanico Pandemonium, petit film mexicain à la carrière étonnante.


Nous sommes quelque part dans une cambrousse mexicaine. Là, vit sœur Maria au sein d’une congrégation qui cultive sa foi, laquelle va être ébranlée par l’apparition d’un personnage qui serait Satan himself. Il va faire naître en elle des désirs que la morale chrétienne réprouve et l’entraîner dans une spirale meurtrière.


Tous les clichés du cahier des charges du genre son là. Maria va se flageller, se prendre de passion pour un jeune homme qui n’a rien demandé de tel, refuser l’autorité, prendre goût aux rapports charnels entre femmes, laisser parler la pulsion. Bref, tout est là. Pour autant, on n’est jamais vraiment dans l’excès. Si le cinéma d’exploitation parie toujours sur le voyeurisme du spectateur, Satanico Pandemonium ne verse pas dans la facilité constante même s’il reste généreux en hémoglobine et en exposition mammaire. A la démarche du systématisme, Solares préfère se concentrer sur son sujet, la remise en question de la foi. Bien que Maria dépasse pas mal de bornes, c’est toujours dans la souffrance qu’elle vit les choses, écrasée par le poids de la culpabilité. Plus que la douleur physique qu’elle inflige à son corps, c’est la perte de la foi et le doute qui la font souffrir. Et quand vient le temps d’assumer, là encore, elle ne parvient pas à faire preuve du courage de la pénitente, ce qui la rapproche toujours plus du mensonge et du diable. La mise en scène appuie sans cesse sur ce combat intérieur, plaçant l’actrice Cecilia Pezet (excellente) au centre de la majorité des plans, explicitant le conflit entre cette beauté extérieur lumineuse mise en valeur par l’écrin de la robe de nonne et cet incendie intérieur matérialisé par ce regard intense mais fuyant. Le cilice ensanglanté sous la robe immaculée. Court, le film ne perd pas de temps et on ne s’ennuie jamais tant la fuite en avant va crescendo. A l’image, les couleurs sont patinées (eastmancolor) et la lumière semble inonder l’écran. C’est plutôt joli.


En clair, très belle réussite que cette petite production mexicaine qui saura trouver sa place dans la filiation de la nunsploitation, proposant un autre récit que celui des Diables de Russell dont il s’inspire. Pour la petite histoire, c’est bien de là que vient le nom du personnage incarné par Salma Hayek dans Une Nuit en Enfer et on connaît le goût de Tarantino pour les clins d’œil de qualité.

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le 6 juin 2022

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