Scorpio
6.2
Scorpio

Film de Michael Winner (1973)

A l'époque où ce film est sorti, j'étais un ado mais je me souviens avoir lu quelque part que le titre du film avait été choisi au hasard parce que le réalisateur et ses 2 vedettes Lancaster et Delon étaient tous les trois natifs du signe du scorpion ; j'avais trouvé ça assez curieux. Le film est également assez curieux, il s'oppose aux James Bond l'année même où Roger Moore endossait le nouveau costume de 007. C'est comme les films d'espionnage plus anciens (L'Espion qui venait du froid, Ipcress danger immédiat ou la Lettre du Kremlin...), sauf que c'est typé 70's, l'espionnage est très seventies, c'est un espionnage trouble et nébuleux, à l'intrigue alambiquée, où l'on constate que ce monde des agents secrets est impitoyable (le vrai, pas celui de Bond), il n'oppose pas des bons contre des méchants, mais des individus qui doivent sans cesse prouver qu'ils sont performants, et la CIA et le KGB sont aussi pourris l'un que l'autre, en employant des méthodes peu orthodoxes. A côté des aventures rocambolesques de 007, celles des agents de Scorpio font frémir.
L'Anglais Michael Winner est surtout connu comme le pourvoyeur d'une kyrielle de films mettant en vedette Charles Bronson à sa grande époque, tels le Cercle noir, un polar violent, le Flingueur et surtout Un justicier dans la ville, premier "vigilante-movie" d'une série... il a même réalisé un bon western en 1970, L'Homme de la loi, avec déjà Burt Lancaster.
La façon dont il mène cette tragique partie d'échecs à travers Washington, Paris et Vienne en rendant avec précision et réalisme des opérations entre des agents internationaux et des tueurs qui ne connaissent que leur cible, est plutôt remarquable. Il ne succombe pas à un festival de scènes d'action, la seule grande scène de ce type étant une haletante poursuite à Vienne qui permet à Lancaster de montrer qu'il n'est pas "à jeter", même s'il comprend qu'il est manipulé. Ici, le scénario assez complexe prend le pas sur l'action, en privilégiant les relations entre les personnages, souvent pleines d'ambiguïtés, et en jouant du vieux cliché "le vieux briscard contre le jeune loup", en magnifiant le duo Delon-Lancaster qui laisse peu de place aux autres acteurs pour exister ; seul le shakespearien Paul Scofield (qui retrouvait aussi Lancaster après le Train) a un rôle intéressant dans la peau d'un espion à la retraite, transfuge du KGB à Vienne. Le reste du casting où l'on reconnait John Colicos, J.D. Cannon et la jolie Gayle Hunnicutt, épaule quand même parfaitement ce trio.
Le film est donc une intéressante aventure d'espionnage et une démystification assez cynique des services secrets, où la bureaucratie et les technocrates broient les agents de terrain, ce qui vaut un final anticonventionnel qui laisse un peu perplexe, mais le film reste très méconnu, en dépit de son duo de vedettes qui prenait plaisir à se retrouver après le Guépard, de même que Delon qui retentait une percée à Hollywood, tient largement la distance face à son partenaire.

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le 24 juil. 2017

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Ugly

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