Si vous n’avez jamais vu Scream, vous n’avez jamais vu de slasher. Ceux qui méprisaient ce film à sa sortie, comme ils méprisaient à l’époque les Dents De La Mer, ont dû réviser leur jugement et le film est devenu à juste titre un film culte.
Car question efficacité le film se pose là. Des jeunes acteurs bien dirigés, le masque emblématique de Ghostface, le couteau Bowie et un sujet qui a pour toile de fond le quotidien d’un campus américain, où les massacres ne sont pas si rares, donnent à ces meurtres en série le petit fond de crédibilité qui manque souvent aux films du genre.
La scène d’introduction avec le tueur qui terrorise sa victime grâce au téléphone est un modèle du genre. Invisible, le tueur semble omniprésent et omniscient. Les indices et les fausses pistes semés durant tout le film en font par ailleurs un classique du whodunit.
Le casting participe au succès de Scream. Côté masculin Fonzie (Henry Winkler) est logiquement devenu avec l’âge le proviseur du lycée ...
Le casting féminin est de très haute tenue. Drew Barrymore, Neve Campbell, Rose McGowan et Courteney Cox surtout rivalisent de charme. On voit qu’Harvey Weinstein a participé au casting...Le montage est parfait, preuve que pour réussir à Hollywood il faut bien monter. Il faut se garder de minimiser d’ailleurs le travail des frères Weinstein dont l’influence colossale à Hollywood a évité le classement du film en NC-17 (interdit aux moins de 17 ans), ce qui aurait signifié la mort commerciale du film. Je précise que je ne tiens pour rien au monde à disculper Harvey Weinstein et si j’en parle c’est parce cet obsédé sexuel, par ailleurs très généreux donateur du Parti démocrate, fut mis en cause par Rose McGowan pour un viol survenu après le tournage.
La musique Red Right Hand de Nick Cave and the Bad Seeds, un extrait de School’s Out du très grand Alice Cooper et Don't Fear The Reaper de Blue Öyster Cult en version acoustique démontrent le soin apporté à la bande-son.
On ne pourra pas reprocher à Scream d’être un simple film d’horreur car il propose en même temps une réflexion sur le genre de l'horreur et se moque de lui-même. Les codes du genre qui sont le reflet de l’Amérique bien-pensante sont énoncés pour être mieux détournés : ne pas faire l'amour, ne pas consommer d'alcool ni de drogues si l’on veut échapper au massacre. Le tueur au téléphone (qui n’a pas de nom mais pourrait s’appeler aussi bien GAFA) est vu en retour comme une allégorie du matérialisme ambiant qui prend au dépourvu le teenager naïf et finit par s’emparer de son âme.
Il n’est pas question d’accuser Wes Craven d’incitation à la violence. Si coupable il y a c’est uniquement le spectateur qui (re)demande du film d’horreur pour compenser l’ennui de la production courante. La preuve en est le triomphal succès populaire de Scream...
Il est par contre heureux que la fête d’Halloween soit rapidement passée de mode en France. Quand la nuit tombée on sonne à la porte de mon appartement du 9-3 et que je me retrouve face à face avec deux grands gaillards portant le masque, le faux coutelas et le costume du tueur (ça m’est arrivé) il vaut mieux ne pas être cardiaque. Heureusement ce n’était que pour réclamer des bonbons...