Adaptation du roman éponyme de Colin Niel, Seules les bêtes est la septième réalisation, en vingt-cinq ans de carrière, de Dominik Moll.


Pour sa nouvelle œuvre, l’auteur opte pour un récit découpé en plusieurs chapitres. Ces derniers correspondent au parcours des différents protagonistes impliqués. Les vécus se retrouvent donc être complémentaires. Le cœur de l’intrigue réside dans la découverte du rôle de chacun au sein de la tragédie narrée.


Le metteur en scène joue sur la lecture récurrente d’un ensemble d'événements où seul varie le point de vue adopté. Cette construction scénaristique est un véritable jeu d’équilibre, car il nécessite d’être en capacité de conserver une cohérence dans la répétition du moment tout en injectant de nouveaux éléments.


La structure du récit s'apparente donc à l'objectif d’une camera, donnant sur une vue panoramique, mais où le réalisateur joue le rôle d’obturateur. Ce dernier décide de ce que le public peut ou non voir et surtout, à quel moment il le dévoile.


On se laisse ainsi guider par la découverte fragmentée de la toile. Chaque nouvelle information redéfinie les enjeux et modifie notre empathie envers les protagonistes. Ces derniers gagnent ainsi en profondeur.


Ce processus fonctionne, bien évidemment, grâce à une construction scénaristique capable d’éviter les pièges inhérents à l’exercice, mais aussi par la prestation livrée par les acteurs.


Retrouver Laure Calamy dans un rôle à contre-emploi est un choix payant. De même, Damien Bonnard confirme qu’il a l’étoffe des Grands. Denis Ménochet est, comme souvent, parfait dans un rôle bien plus complexe qu’il n’y paraît. Le reste du casting incarne avec justesse leur rôle respectif.


À travers cette histoire, Dominik Moll retranscrit la solitude d’êtres vivant dans des contrées isolées. L’œuvre observe les relations humaines qui se nouent. Ici, l'attraction et l’amour ne sont que des façons de fuir leur isolement auprès d’individus dans la même situation. Ce constat est la cause même de tous les malheurs rencontrés par ces personnes. L'affection s'exprime de différentes façons. Cette multiplicité crédibilise d’autant plus le récit et l’inscrit dans son époque.


Il se dégage donc une profonde morosité dans la trajectoire empruntée par chacun. De par leur motivation respective, l’auteur évite tout manichéisme et met en exergue la tragédie de ces situations.


Seules les bêtes est une œuvre réussissant à créer un thriller à partir du drame sociétal dont il puise ses sources.

tzamety
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le 27 nov. 2019

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tzamety

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