Il est amusant de constater que Marvel et DC aient décidé de présenter leurs Captain Marvel dans deux films qui leur sont dédiés, à un mois d’intervalle. Les ambitions ne sont pas les mêmes, le ton non plus, celui de Marvel étant une mise en bouche pour introduire le personnage avant Avengers Endgame. Celui de DC, s’il n’est pas relié à un grand évènement, fait tout de même partie du même univers partagé. Mais il s’est incliné en laissant la paternité du titre à Marvel.

L’histoire éditoriale du personnage est assez mouvementé, puisqu’il a été crée en 1940 par l’éditeur Fawcett Publications. Il est alors plus populaire que Superman, dont il s’inspire. En 1953, DC décide d’attaquer Fawcett pour plagiat, la publication s’arrête et l’éditeur rachète le catalogue de son concurrent en 1972, avec Captain Marvel. Pas de bol, les droits du nom ont été repris par Marvel entre-temps, ce qui contraindra DC par la suite pour l’emploi du terme « Captain Marvel ». Depuis 2011, c’est plus simple, c’est Shazam. Mais le premier Captain Marvel, c’est lui.

En résumant près de 80 ans de publications, Captain Marvel raconte les aventures d’un petit garçon, Billy Batson, à qui il est attribué différents pouvoirs divins qu’il obtient en prononçant le nom de Shazam, ce qui le fait transformer en adulte costaud. La différence avec Superman réside dans l’origine de ses pouvoirs, magiques, et dans le fait qu’il s’agisse d’un petit garçon comme personnage principal, avec une certaine naïveté et bonté.

Dans Shazam !, le film, des éléments sont repris, d’autres non. Il s’agit toujours de Billy Batson, choisi par un vieux sorcier qui lui offre ses pouvoirs. Mais Billy est un adolescent de 16 ans. Il a perdu, littéralement, sa mère depuis ses 3 ans et fugue de familles d’accueil en familles d’accueil en espérant la retrouver. Le premier souci à avaler, c’est de croire qu’elle ait pu être introuvable tout ce temps. Mais Billy est persévérant, c’est un petit malin, mais qui a du mal à penser aux autres, obnubilé par sa quête de retrouver sa mère. Il arrive dans une nouvelle maison d’accueil, déjà bien remplie de jeunes têtes, et va se retrouver avec de nouveaux pouvoirs, confiés par un sorcier à bout de souffle.

Dans la plupart des films de capes et de collants, l’héroïsme va de soi ou s’apprendra avec un petit drame, grands pouvoirs grandes responsabilités, toussa. Billy Batson ne va pas le découvrir tout de suite. Il va s’amuser et en prendre les avantages. Avec son corps d’adulte, il va pouvoir acheter de la bière, par exemple. Grâce à sa célébrité, il va monnayer quelques uns de ses tours.
Pour lui qui n’a jamais eu de figures d’adultes, une fois qu’il en est devenu un, il est déboussolé, ivre de sa nouvelle situation. Mais en dehors du cas typique de Billy, quel adolescent ne profiterait pas de cette situation ? Et peut-être même beaucoup d’adultes aussi. Cette phase d’apprentissage de ce nouveau corps et de ses corps est pleine d’humour, se moquant aussi bien des adultes que de certaines conventions superhéroiques. Avec un de ses nouveaux frères d’adoption, Freddy, tous deux vont s’amuser avec le regard d’un adolescent, entre naïveté enfantine et moquerie juvénile. Les mimiques de Zachary Levi dans le costume sont ainsi hilarantes, loin de la dignité d’un Superman ou Batman mais Asher Angel qui joue Billy Batson est aussi très convaincant, dans ce rôle d’adolescent mutin mais au grand coeur.

La situation évoluera sous l’influence de deux forces qui amèneront Billy Batson/Shazam à devenir un vrai héros. La première, la plus évidente, c’est la présence d’un super-vilain, Thaddeus Sivana, interprété par un Mark Strong pas-content-du-tout, tout le long du film. La bonne idée de départ, celle de faire du personnage un précédent recalé par le sorcier est vite gâché. Pour les scénaristes, c’est une raison suffisante pour être méchant, de ne pas avoir été choisi et d’avoir des problèmes avec son père. Par conséquence, il en veut à Shazam et veut lui prendre ses pouvoirs. Il est accompagné par les 7 péchés capitaux, des anti-Jiminy-Criquet, des créatures assez génériques. Si Thaddeus manque de conviction, ses affrontements avec Shazam sont assez intéressants, notamment grâce à la personnalité du héros. De plus, en pourchassant Billy Batson et en s’en prenant à sa nouvelle famille, il va forcer notre héros à l’assumer en tant que telle.

Si la menace qui lui est opposée est réelle, mais manque de crédibilité, ce n’est pas le cas des nombreux personnages qui tournent autour de Billy, sa famille d’accueil. Alors qu’elle est souvent considérée comme une gêne, une cible potentielle quand les liens familiaux sont utilisés dans un film de super-héros, ce n’est pas le cas ici. C’est au sein de celle-ci que Billy trouvera une nouvelle direction. Sans spolier, le film contient plusieurs surprises dans ce domaine, qui ne font pas de Shazam ! un film opportunément progressiste. La galerie de personnages qui entoure Billy est assez bien trouvée et se révèle attachante, même si le temps qui leur est imparti est forcément plus ou moins réduit

On ressort du film David F. Sandberg remonté à bloc, amusé et conquis par ces nouveaux personnages, par l’insolence adolescente du film mais aussi par ses bons sentiments savamment dosés, malgré quelques couleuvres à avaler. On en viendrait très sérieusement à regretter la présence d’un super-vilain, tant Captain Marvel (le vrai) fait des étincelles presque tout seul. Après Wonder Woman ou Aquaman, et malgré leurs défauts respectifs, ce dernier film de l’univers cinématographique DC confirme l’impression qu’il peut exister en dehors de ses têtes d'affiches telles que Superman et surtout Batman.

SimplySmackkk
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le 17 avr. 2023

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