Sherlock Holmes affrontant Jack l'Eventreur, c'était une idée qui valait la peine d'être creusée. Le plus grand des détectives face à l'un des plus connus des tueurs en série, tueur ayant mit Scotland Yard en échec, le sujet avait du potentiel.
Malheureusement, le mauvais traitement du cas fait perdre bien des points à ce film.


Le début tout d'abord, est assez lent. Je n'ai rien contre les introductions qui prennent leur temps, mais encore faut il qu'elles soient soignées, ce qui n'est pas le cas ici. On nous présente une prostituée se faisant transpercer la gorge par un couteau, arme du crime étant abandonné là. Est ce pour montrer l'ambiance peu sûr des quartiers pauvres de Londres ? Non, puisque l'on est amené à déduire par la suite qu'il s'agissait là de la première victime de Jack l'Eventreur. Un éventreur qui n'éventre pas, et alors ? Il se contente d'ailleurs de larder sa deuxième victime de coups de couteau dans un bac d'eau.
Mais soit, les premiers meurtres sont peut être bâclés, mais Sherlock et son ami entrent en scène, et Holmes s'acharne à nous prouver qu'il est bien Holmes à grand coup de déductions (normal) et de phrase culte sur les déductions. On s'attend alors à ce que le duo se lance dans son enquête, mais nous découvrons alors que nous sommes toujours dans l'introduction du film, et que l'enquête n'est pas prête à démarrer.
On poursuit alors en suivant la troisième victime de Jack (et non en allant à Whitechapel avec nos héros). Et pour la suivre, nous la suivons. Avec un déhanché qui ferait pâlir d'envie un pochard dansant le sirta cuit, elle se promène gaiement dans le quartier à la recherche d'une couche. Bien entendu, suspens oblige, on tente de nous faire croire à plusieurs reprise que son heure est venue avant que ce ne soit vraiment le cas. Le film oublie que lorsque l'on tape dans le suspens, il est bon de ne pas y mêler d'autres genres et l'on a plus envie de rire que de trembler en la voyant se trémousser.


Au bout d'un bon quart d'heure de film donc, nous n'avons rien vu de transcendant, mais nous gardons espoir. Lestrade patauge mais Holmes semble décidé à s'y mettre sérieusement avec l'arrivée d'un colis anonyme. À croire que l'énigme posée par la boite d'instruments chirurgicaux qu'il vient de recevoir est plus stimulante que celle d'un maniaque homicide. Il est vrai que l'étude de la boite est plus propice à une nouvelle démonstration de la logique du détective. Mais soyons optimistes, ne nous plaignons pas. Puisqu'il décide d'enquêter réellement cette fois ci, le film peut commencer pour de bon et se montrer intéressant.


Et de fait, à partir de ce moment là, l'enquête débute et l'on peut se mettre à cogiter avec Holmes.
Avec Holmes seulement notons le, Watson n'étant là qu'en guise de porteur de mallette ou d'instrument. Certes le personnage a toujours eut une place particulière dans le duo et dans les écrits de Doyle, mais tout de même ! Il ne représente plus là un homme lambda à l'intelligence moyenne auquel on pourrait s'identifier et qui révèle le génie de son ami mais un simple benêt gaffeur s'offusquant des manières d'indigents et incapable de garder son sang froid face à un personnage défiguré -sympas pour un médecin... L'acteur se débrouille plutôt bien, mais le rôle est trop mal pensé pour qu'il puisse convaincre.
La légèreté du personnage est d'autant plus triste que celui de Holmes n'est pas trop mal dépeint. Avec classe et talent, Neville se hisse à la hauteur d'un Cushing, rivalise avec Brett (le Holmes de mon enfance) et tout autre bon Sherlock. Plein de logique, de hauteur et manipulateur, il reprend plutôt bien les traits de son modèle de papier, ce qui sauve un peu les meubles.


L'affaire de son côté, n'est pas mauvaise. Plutôt bonne même. Complexe comme il se doit, avec des personnages brouillant les pistes, elle se laisse suivre et explore différentes voix, dans les beaux quartiers ainsi qu'à Whitechapel. Sa conclusion est logique, bien pensée et bien que Scotland Yard bénéficie des cendres du tueur, son identité leur reste cachée afin de ne pas faire tâche vis à vis de la réalité.


Mais ce qui m'a le plus agacé à vrai dire, est la récurence des rappels à l'oeuvre de Conan Doyle.
En voulant absolument nous faire comprendre qu'il s'agit bien là d'un Sherlock Holmes, le film appuie trop sur les détails. Incapable de se contenter des méthodes du détectives afin de planter le personnage et le film, on éprouve le besoin d'insister avec des points de détails lassant. Que l'on nous montre son talent pour le déguisement était compréhensible dans l'histoire. Que l'on rajoute en prime citations, apparitions de Mycroft (totalement inutile puisque Lestrade savait déjà Holmes sur l'affaire) ou même recherche acharnée de sa pipe (qu'il ne fume d'ailleurs pas, lui préférant le cigare), c'est un peu trop. Le spectateur n'est pas stupide et la fidélité des personnages est toujours plus efficace que des allusions grossières pour qu'il se prenne au jeu.


Malheureusement, à quelques exceptions faites, les personnages ne sont guère séduisants pour les neurones et l'imagination.
La mise en scène est correcte malgré ses faiblesses lors des moments d'actions tels que les meurtres ou l'affrontement final de Holmes avec l'Eventreur, ce qui gâche le film mais aurait put être rattrapable. Mettre le spectateur dans la peau de l'Eventreur durant ses crimes était une bonne idée. Mais la manière dont nous voyons le couteau se planter ou les victimes se faire tuer est décevante. la suggestivité messieurs, rien de mieux pour éviter les plans sur les blessures et vous'mettre une bonne ambiance ! D'ailleurs, la vu du tueur recoivrant sa proie de sa cape dans une ruelle sombre était bien pensée ! Pourquoi ne pas continuer ?


Seul la musique, la photo et les costumes sont réellement au niveau et plantent l'ambiance des différentes scènes avec succès. Nous voilà revenu à l'époque de l'Eventreur, nous pouvons sentir ces routes pavés humides sous nos pieds et la fraîcheur de ces nuits sombres. Une maigre consolation.


Sherlock Holmes contre Jack l'Eventreur n'est donc pas un film foncièrement mauvais, mais il échoue à être convaincant. Bien que le scénario soit plus que correct et le dénouement logique, les erreurs de la mise en scène et la manière dont certains personnages sont caricaturés - ou bâclés c'est selon - font rapidement retomber le plaisir. Un film qui se laisse regarder, mais qui ne fera que tuer le temps sans être grandiose.

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le 20 mars 2016

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Gaby Aisthé

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