SHTTL
6.4
SHTTL

Film de Ady Walter (2022)

Captivant, oppressant et si humain…


Le récit se déroule le 21 juin 1941 dans un village juif (shtetl en yiddish) de la république soviétique d’Ukraine. Nous sommes à la veille de l’invasion nazie qui s’est accompagnée de l’élimination plus de 1 million et demi de juifs ukrainiens lors d’un épisode, peu connu, dite « Shoa par balle ». C’est un huis clos qui va se dérouler dans ce village, fermé sur lui-même, avec trois protagonistes. Les hassidistes attachés à la tradition, les prosoviétiques se réclamant de la classe ouvrière et de leur leader, Staline et un homme jeune revenant de la ville qui, progressivement, va devenir le représentant du courant « progressiste », en rupture avec une tradition religieuse jugée oppressante. Le contexte de guerre, pourtant aux portes du village (la Pologne située à proximité est occupée par l’armée du Reich), va s’effacer en laissant place à une confrontation, souvent houleuse/hargneuse, entre traditionnalistes et novateurs qu’ils soient partisans du pouvoir communiste ou bien simplement lassés par des règles contraignantes. Le passé du jeune homme de la ville, son attachement filial, va éviter que les différends qui s’accroissent au fur et a mesure de la progression du récit ne deviennent par trop manichéens. Et c’est précisément cette confrontation ponctuée de réflexions sur la tolérance, la foi, l’unité de la communauté face aux menaces qui fait que ce film devienne captivant. En effet, on adhère à cette confrontation, malgré son aspect controverse religieuse un peu aride, inhabituel surtout pour des « mécréants ». L’utilisation du Noir et Blanc y fait beaucoup. Il confère une certaine sobriété accentuant le côté dramatisant du récit, il facilite notre intégration à cette confrontation étouffante sans être distrait par des « scènes colorées ». Le jeu d’acteur est réaliste, voir même austère. D’ailleurs cette austérité concourt à une impression de trop plein didactique au détriment d’un contexte dont la charge dramatique est à peine suggérée. Pourtant, elle devrait être présente, d’une manière ou d’une autre, car le spectateur que nous sommes sait que l’assaut des einsatzgruppen est imminent… C’est à ce niveau que l’on adressera une critique vis-à-vis de la réalisation de cette œuvre cinématographique sortant de l’ordinaire. Une certaine dérive qui conduit à focaliser l’intérêt vers une joute entre différentes interprétations des règles du judaïsme mais qui « laisse tomber » presque totalement le contexte de tension dans lequel elle se joue au point de le faire quasiment oublier. D’ailleurs, cette « dissonance tensionelle » se manifeste avec éclat dans la scène finale qui apparaît presque comme saugrenue…



Braucol
8
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le 25 janv. 2024

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