Sybil est une oeuvre complexe au récit éclaté qui a le don d'envouter par un tourbillon d'émotions fortes. En surface, les situations apparaissent comme simples, même anodines, mais très rapidement, grâce à la force du montage, l'histoire s'emporte dans des imprévus qui chamboulent l'ordre des choses, marquant alors la destinée de cette héroïne contemporaine, et remuant son passé, ses origines et son inconscient. La thérapeute en voie de reconversion, gardienne des mal-êtres et des non-dits de ses patients, bascule dans l'appropriation des problèmes de sa patiente pas si patiente... C'est à partir de là que ce puzzle de personnages, de lieux et de temporalité laisse place à un tumulte complexe, violent et exacerbé. C'est déroutant, certes, tellement riche qu'on on en perd beaucoup de miettes mais l'impact de ces vagues virulentes laisse entrevoir un personnage féminin fragilisé mais passionnant.
Virginie Efira livre une super performance charnière dans sa carrière, tout en filigrane, d'abord observatrice et impuissante face au désarroi de l'autre pour se plonger de plus belle dans les abysses marécageuses de son être. Elle est entourée d'une incroyable bande d'acteurs et d'actrices : les femmes étant celles qu'on retient le plus ! Adèle Exarchopoulos en première ligne signe une partition dense et à fleur de peau (sans doute son meilleur rôle depuis La vie d'Adèle), Sandra Hüller excelle en réalisatrice excédée et Laure Calamy, en soeur taquine, offre un miroir émotionnel intéressant.
Le montage est à l'image de cette femme en pleine confusion, en pleine renaissance. Confus, déroutant, parfois imprécis. La tension dramatique tangue quelque fois en perdant le fil, ce qui nous fait sortir un peu de l'action du film. Sibyl finit même par perdre le contrôle, quitte à rentrer dans l'extrême via de situations bien poussées. Mais il y a vraiment de la bonne matière et une vraie richesse dans ce personnage si justement interprétée par Virginie Efira. On ne reste pas indifférent. Ça fait quelques jours que je suis allé le voir et je suis ravi de constater que beaucoup d'images me restent. L'histoire de Justine Triet traverse et transcende vraiment quelque chose d'imperceptible et de fort ! C'est certain.

alsacienparisien
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le 2 juin 2019

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