Ce n'était pas le sujet principal de "Triangle of Sadness" (aka Sans Filtre) mais je trouve que Ruben Östlund parvenait à décrire avec beaucoup plus de pertinence les relations de domination au sein du couple que ce que propose "Sick of Myself", une satire norvégienne lourdingue sur le narcissisme contemporain qui s'étale à longueur de journée. C'est très probablement lié à l'adhésion à cet humour, mais en tous cas en ce qui me concerne j'ai trouvé l'ensemble incroyablement lourd et démonstratif, une satire qui ne sait clairement pas quoi faire de la profusion de clichés qu'elle manipule avec en prime un abus très net d'effets en tous genres pour sans cesse tenter de redynamiser la narration. On se doute bien que c'est volontaire, et donc plus une faute de goût qu'une maladresse, mais alors le recours aussi récurrent aux "fausses images", c'est-à-dire à l'insertion de séquences relatives à un rêve ou à l'imagination de la protagoniste dans la continuité de la réalité du film, c'est une horreur qui devient extrêmement insupportable et ce d'autant plus qu'on s'approche de la fin.


En fait ce sont les prémices qui ne fonctionnent pas, à mon sens. Toute la satire aurait pu fonctionner car le fond du propos est loin d'être idiot ou infertile, mais manifestement Kristoffer Borgli n'a pas su l'illustrer avec davantage d'adresse qu'une banale histoire de couple en compétition dans l'arène de la célébrité. Bon sang que c'est pénible ces caricatures d'artiste contemporain qui cherche à percer et de conjoint qui cherche à détourner l'attention en simulant une maladie rare... La seule chose un peu drôle, c'est de voir débouler Anders Danielsen Lie là-dedans, dans son propre rôle si on peut dire (il est médecin à côté du métier d'acteur). Un film qui se veut très provocateur, mais dont l'humour noir peine à convaincre au sein de la scène artistique d'Oslo, avec les défauts d'œuvres poussives comme "The Square" sans en avoir les qualités. Une satire du narcissisme pathologique entre Östlund et Seidl un peu trop portée sur l'humiliation stérile.

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le 22 mai 2023

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Morrinson

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