Avec une caméra qui s’attarde sur un cavalier solitaire en train de traverser de vastes contrées arides, "Sierra torride" aurait pu commencer sur la chanson si chère à Lucky Luke, à savoir "I’m a poor lonesome cow-boy". Au lieu de ça, la partition parodique d’Ennio Morricone frappe d’entrée et produit son effet dès ses premières notes. A la fois entraînante et entêtante, elle donne le ton de ce western quelque peu gaguesque. Et quand enfin nous avons le pourquoi de cette focalisation sur ce mystérieux cavalier, le spectateur a de quoi être étonné, ébahi, soufflé… enfin vous choisirez le terme qui vous conviendra. Quoiqu’il en soit, c’est dans le bon sens du terme.

Cette surprise ne s’exprimera toutefois pleinement qu’à la condition où le spectateur n’a connaissance que du titre donné à la version doublée en français, le titre original spoilant plus ou moins la nature de la rencontre à laquelle ce cavalier va être confronté.

Question scénario, il semble suivre les pérégrinations du nouveau duo. En effet, on pourrait croire aisément qu’il a été écrit au fur et à mesure du tournage selon l’imagination à flux tendu des scénaristes, ce qui n’est pas le cas du fait que Budd Boetticher, initialement dessus, mûrissait le projet depuis plusieurs années déjà. Le ton décalé du film ne nous fera pas trop tenir compte des anachronismes : l’action est sensée se dérouler dans les années 1860, et la fête nationale française n’a été instaurée qu’en 1880. Et je pense qu’il y a aussi à dire sur les armes utilisées par Hogan (Clint Eastwood). Non, en fait ce film vaut surtout pour l’association Eastwood/MacLaine, sublimée par la partition une nouvelle fois géniale d’Ennio Morricone, en particulier le thème principal au film.

Pour en revenir aux acteurs principaux, ils s’en donnent à cœur joie, autant dans les attitudes que dans les dialogues.

En somme, c’est un western qui vous fera bien rire de temps en temps, que ce soit par les facéties de Sara ou par les aveux très directs de son compagnon de route. Qui plus est, le plaisir de retrouver Eastwood est bien réel, Don Siegel ayant repris le visage barbu de l’homme sans nom créé par un certain Sergio Leone, ainsi que la petite dose de cynisme qui le caractérisait et… le cigare. Sauf que cette fois, le cigare est un accessoire utilisé pour la comédie, car il matérialise une petite manie de Hogan : pour enflammer une mèche (ou autre chose), il le fait par l’intermédiaire d’un cigare qu’il a préalablement allumé. Non mais franchement ! Il n’aurait pas plus vite fait d’allumer directement la mèche ? Lol ! Mais que voulez-vous ? On a de ces manies, parfois…

Point de vue mise en scène, quelques approximations, notamment dans les axes de tir, que je qualifierai de… très approximatifs. Le plus flagrant est quand Hogan descend un soldat français posté en hauteur. Après, la réalisation est sobre, tout du moins sans effet de style. Le rythme est bien tenu, ce qui fait qu’on ne s’ennuie jamais. Et en plus on s’amuse, on se surprend à battre le tempo musical, et la complicité du couple MacLaine/Eastwood finit de rendre le tout diaboliquement divertissant.

Personnellement, j’adore ce film, bien que ce ne soit pas un chef-d’œuvre, loin de là. Sur ce dernier point, je pense que nous sommes tous à peu près d’accord. Mais qu'est-ce que j'aime la musique !

Stephenballade
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le 29 nov. 2022

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Stephenballade

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