Mention : Brillant

Les vacances à la neige comme point de départ, ou de rupture. L'histoire d'une famille confrontée à une avalanche, comme pour signifier la tournure grossissante du malaise. Métaphore visible du brouillard qui s’épanche sur le cocon familiale. Un voyage dans le froid qui s'accorde parfaitement avec une ambiance parfois glaçante. Ce portrait de famille a quelque chose d'universel, malgré son originalité évidente. C'est même frappant comme la situation pourrait être toute autre, sans changer le fond du propos. Le contexte dans lequel s'inscrit "Snow Therapy" est facilement transposable. Mais le contexte alpin fait toute la singularité du film.

Ce qui frappe en premier lieu, c'est la brillante utilisation des décors; pour ce qu'ils ont de naturel avec les magnifique plans enneigés, contemplatifs et symphoniques, mais aussi pour ce qu'ils ont d'architectural. Au-delà du très bel hôtel, la photographie est d'une précision remarquable. La mise en scène très travaillée est d'une grande beauté et conjugue le sens du récit.

Enveloppés dans un certains confort de vie, la famille se retrouve malgré tout dans de beaux draps. Le simple rituel du brossage de dents symbolise la mécanique qui se grippe et finit par hérisser le poil. Le film commence sur une scène assez cocasse de séance photos. Comme pour annoncer l'aspect thérapie de ce qui va suivre, le photographe tente avec insistance de rapprocher cette famille. Parmi ces photos, des portraits resserrés. Ce qui prévoit le focus sur chacun de parents.

La mère névrosée qui croule progressivement sous la rancœur. Abasourdit par une simple réaction spontanée de son époux, elle va nourrir ce ressentiment jusqu'à exploser. Blessée mais pas brisée, elle garde une certaine dignité, grâce notamment à l'écoute de rencontres fortuites. Ebba est une mère enragée mais néanmoins séduisante. De rares plans charnels subliment son corps. Instants de charmes légers et subtils.

Il y a chez son mari une fausse quiétude. Ce qui paraît comme une béatitude va fondre comme neige au soleil. Avant qu'il ne finisse par s'exprimer et trouver quelqu'un à qui se confier, Tomas reste dans un mutisme confondant. Son silence consterne car donne faussement l'air d'être de l'arrogance.

Deux couples apportent une oreille extérieur. Lors d'un premier diner, Tomas et Ebba crèvent l’abcès et s'embrouillent devant deux amants perplexes. Le second couple rencontré est très réceptif. Chacun prend la défense de l'autre. Seulement dommage que la solidarité ne croise pas les sexes. Cependant le nouveau camarade aux allures de bûcheron va tout libérer. Au terme d'une excursion avec lui, Tomas va s'ouvrir. Leur expédition en ski nous offre une balade dans un paysage fabuleux. Cela amène surtout Tomas à briser la glace, il finit par craquer; sans redire les raisons du malaise, ce qui est tant mieux car elles sont déjà très claires.
Il va s'en suivre une scène déroutante. Un incroyable détour. Pour décompresser, les gars s'offrent un verre. Ils se retrouvent sur une terrasse qui a tout d'une boite branchée. Drague improbable, danse-musique, mais en plein jour et au milieu d'un étendu de neige. Ce passage plutôt décalé accentue l'aspect dérisoire de l'environnement. La sortie vire à la débauche comme une soirée arrosée pour noyer ses chagrins. Remplacez les pistes de ski par la piste de danse, situez la scène dans un bar et le retour honteux au petit matin, et on est dans du traditionnel.

"Snow Therapy" n'est pas un film usuel. C'est le portrait très rythmé et déjanté d'une famille comme les autres, agrémenté de décrochages absurdes très imagés.
L'intrigue est construite avec adresse. Une simplicité dans la façon d'apporter les éléments du récit qui est prenante de réalisme. L'art de suggérer sans être trop évasif.

Il s'agit d'un état des lieux de la vie d'un couple, tombée dans une triste routine, et non d'un constat de la difficulté de vivre à deux (et plus si affinité). Déception cependant sur le dernier jour qui termine ce voyage un peu dans le brouillard. Les deux dernières scènes sont moins significatives. Peut-être pas la conclusion qu'on attendais d'un périple nourrit d'un certains cynisme.

Note : 15 / 20
adamkesher01
8
Écrit par

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le 8 févr. 2015

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2 j'aime

Adam Kesher

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