Quels que soient les défauts que je peux reprocher à Spider-Man : New Generation, je ne peux que saluer l'originalité et la réussite totale de ses partis pris artistiques en terme d’esthétique, de réalisation et d'animation. C'est la raison pour laquelle je vous encourage avant toute chose à voir ce long-métrage au cinéma, surtout si vous vous êtes résignés à vous divertir devant les cargaisons de blockbusters super-héroiques infâmes que Disney et Warner nous servent depuis une dizaine d'années.


Assumant pleinement sa parenté avec la bande-dessinée, le film est littéralement un comics sur grand écran dans lequel toutes les caractéristiques visuelles et narratives du genre fourmillent tout au long du métrage. Lui conférant une identité unique et une richesse de tous les instants sans jamais l’ensevelir ou réduire la portée de sa puissance visuelle. Un tour de force impressionnant qui rappelle les expérimentations fabuleuses de Scott Pilgrim et qui ici, grâce aux possibilités de l'animation, prennent une mesure encore plus épique.


Mais la filiation avec le comics se retrouve également dans le scénario. Miles Morales devant en effet faire équipe avec une ribambelle d'autres Spider-Mans issus d'univers proches ou radicalement éloignés du sien. Donnant lieu ici à de savoureux moments de comédie jouant sur les caractéristiques et les codes de ces différentes versions d'un même héros. Un aspect méta et auto-parodique qui constitue pour moi le point fort du film et la source de ses meilleurs gags. Je l'ai vu deux fois au cinéma et pourtant je n'ai pas pu contenir mes fous rires au deuxième visionnage tant l'ingéniosité de l'humour m'a rendu hilare. Une expérience que j'ai rarement vécu en salles cette année.


D'autant que tout cet enrobage méta du long-métrage ne sert pas qu'à générer du gag mais permet aussi d'apporter un développement pertinent au propos sous-jacent de l’œuvre.
Car, à l'instar d'Astérix, sortit la même semaine, notre film aborde lui aussi la question de l'héritage et de la transmission à travers la destinée de son héros. Un jeune garçon un peu paumé, ayant peu confiance en lui et qui tente tant bien que mal de trouver sa place. Autant dans sa vie privée, au sein d'un collège réputé où il ne se sent pas à son aise, que dans sa vie publique où il essaye de reprendre le costume de Spidey alors qu'il a beaucoup de mal à maitriser ses pouvoirs.
Les différentes versions de Spider-Man qui l'accompagnent vont alors lui servir de mentors. Lui apportant un idéal qu'il pourra ensuite transcender en s'assumant lui aussi tel qu'il est pour s'inscrire pleinement dans la lignée de ses modèles tout en traçant également sa propre route.


A la sortie du cinéma, on ne peut qu'être admiratif devant la richesse visuelle et thématique de ce film d'animation qui se hisse sans problèmes au rang des autres blockbusters du genre, tout en ayant pour lui une personnalité propre qui le distingue de tous les autres, exactement comme Miles Morales dans sa propre histoire.
Au point qu'il serait facile d'éluder les défauts pour ne retenir que les qualités. Malheureusement, ceux-ci sont bels et bien présents et sautent davantage à la gueule au second visionnage.


En effet, si l'exposition présente bien le personnage, son univers et les enjeux du récit. Je trouve cependant qu'elle traîne en longueur et qu'elle n'encourage pas forcément le spectateur à en voir plus. De plus, l'humour pourtant si excellent dans toute la suite du film paraît au premier abord extrêmement forcé. Comme si les scénaristes s'étaient obligés à rajouter des blagues au début de leur histoire alors qu'elles n'étaient absolument pas nécessaire.
Le long-métrage ne décolle vraiment qu'à partir du moment où Miles commence à développer ses pouvoirs. C'est à ce moment là que le film montre l'étendu de son audace. Et lorsque Peter B Parker arrive enfin dans le récit, le public se retrouve totalement conquit et embarqué dans le délire qui lui est proposé. Mais tout cela met tout de même beaucoup de temps à se mettre en place.


Aussi, ce n'est pas un hasard si le terme "délire" me vient spontanément pour décrire New Generation. Car le film reste à mes yeux une grande comédie méta, dans la veine des deux premiers films Lego nés eux-aussi sous la coupole de Phil Lord et Chris Miller, tous deux scénaristes et producteurs de ce Spider-Man. Alors que, j'en suis conscient, il serait réducteur de ne parler du film qu'en ces termes. Puisqu'il a en effet l'ambition d'être également un film d'aventure au premier degré, avec des enjeux forts et une véritable dramaturgie s’accompagnant d'évènements graves qui ne sont pas du tout traités à la légère.
Et c'est selon moi ici que le bas blesse. Car compte tenu de la nature même du film et de son concept, le mélange entre sérieux et décalage ne fonctionne pas très bien. D'autant que si le film a l'apparence visuelle d'un comics, il en récupère aussi les travers de narration et de développement. C'est à dire une superficialité dans le traitement des personnages et un rythme effréné ne permettant presque jamais au récit de se poser quelques instants.


Il y a cependant une relation dans le film qui est parfaitement traitée, c'est celle entre Miles Morales et Peter B Parker. Ce dernier étant la version de Spidey se rapprochant le plus de notre héros, c'est naturellement lui qui apparaîtra comme la figure de mentor la plus représentative. D'autant que nous avons affaire à un Spider-Man plus âgé, désabusé et qui, lui aussi va apprendre et évoluer au contact de son jeune apprenti.
Une relation touchante et bien construite qui sert admirablement le propos de fond, ce qui n'est pas le cas avec les autres alliés de Miles.
Il est effectivement regrettable que Penny Parker, Spider-Man Black ou Spider-Cochon ne soient là que pour la blague et ne servent pas plus à assurer leurs rôles de mentors auprès du personnel principal, alors que leurs différents parcours pourraient chacun lui apporter quelque chose.
Et il en va de même pour Spider-Gwen, qui reste un personnage très anecdotique voire inutile dans le film et dont la relation avec Miles est totalement survolée.


C'est pour toute ces raisons que je trouve New Generation inégal et moins bien construit que Les Indestructibles 2, film du même genre sortit cette année. Mais, à l'inverse du studio Pixar qui se repose plus que jamais sur ces acquits au point de nous sortir une suite très similaire au premier volet. L'équipe de Sony en charge de ce Spider-Man ont repoussés leurs limites et faits preuve d'originalité pour accoucher d'un long-métrage animé qui ne ressemble à aucun autre. Apportant de surcroit une bouffée d'air frais dans le paysage de cette fin des années 2010 et qui, j'en suis sûr, ne laissera pas indifférente la production cinématographique dans l'animation comme dans les films de Super-Héros. Et dire que le studio d'une œuvre aussi vivifiante est aussi responsable d'une des pires abominations que l'Enfer est jamais connu


Osons le dire, Spider-Man New Generation bien qu'imparfait est sans doute un futur classique de l'animation, voire plus...

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le 9 janv. 2019

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Alfred Tordu

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