Revoir le monstrueux "Starship Troopers" en 2016, après la réussite artistique de "Elle", permet de vérifier combien le cinéma de Verhoeven est cohérent et, n'ayons pas peur des compliments, magistral.


20 ans plus tard, "Starship Troopers" n'a pas pris une ride, malgré ses effets spéciaux forcément dépassés (mais jamais ridicules, entendons-nous bien !) : il est au contraire permis aujourd'hui de qualifier Verhoeven de "visionnaire" tant son pamphlet politique contre une humanité (américaine, mais pas que...) en route vers la déshumanisation à grand renfort de haine de l'autre, de célébration de la violence, de mépris envers les faibles, est aujourd'hui pertinent : depuis 1997, on a eu 9/11, Bush et les néo-cons, l'Irak et la Syrie, les attentats de l'EI, la multiplication des massacres liés à la prolifération des armes, le retour de l'extrême droite,... tout ce que "Starship Troopers" donne à voir à travers le filtre d'une ironie jouissive, aussi frontale que délicieusement méchante.


Mais le coup de génie absolu de Verhoeven, c'est de ne pas choisir entre pamphlet politique et grand film de SF d'action, de prouver ici comme nulle part ailleurs - sauf dans "Elle", justement - qu'on peut combiner premier et second degrés au cinéma sans faire le malin au détriment du spectacle et sans prendre de haut son spectateur. La délicieuse jouissance ressentie devant les scènes épiques (et souvent horrifiques) de "Starship Troopers" n'est pas désamorcée par la conscience aiguë qu'on a de la perspective rigolade que Verhoeven applique à son sujet, et vice versa, la critique n'est jamais décrédibilisée par l'enthousiasme avec lequel sont filmés ici les carnages les plus implacables.


Le soin apporté à une image parfaite et quasi déréalisée, le choix d'acteurs au physique presque grotesquement parfait, l'efficacité d'un scénario nous amenant nous-mêmes à la répulsion devant les actes barbares d'un "ennemi" incompréhensible et forcément abject, tout dans "Starship Troopers" concourt à la réussite exceptionnelle d'un projet follement ambitieux.


Il ne nous reste plus qu'à souhaiter que le "Hollandais violent" n'ait pas également raison avec son final effrayant nous prédisant un avenir néo-nazi !


[Critique écrite en 2016]

Créée

le 4 juil. 2016

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Eric BBYoda

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