Premier volet de la trilogie des trois mères, Suspiria est le chef-d'oeuvre d'un maestro délaissant ses giallo aux noms d'animaux pour plonger tête baissée dans le fantastique pur, dans une horreur ésotérique et maléfique, inspirée des écrits de Thomas de Quincey et et la mythologie gréco-romaine.


Suspiria, c'est l'oeuvre la plus aboutie d'un Dario Argento au sommet de son art, accouchant d'un tableau à la beauté picturale fracassante, un cauchemar éveillé tétanisant jouant constamment avec notre perception et notre rapport aux couleurs primaires, celles qui vous explosent la rétine et vous laissent avec une marque impérissable.


Suspiria, c'est donc du bleu d'acier, nocturne et glacial. Du jaune chaud comme les braises. Et du rouge. Le rouge des murs, le rouge des lèvres, le rouge du vin. Et surtout, le rouge de l'hémoglobine. Du sang qui vient éclabousser l'écran. Epais, criard, indélébile, qui souille des héroïnes virginales plongées en plein conte cruel digne des frères Grimm dont elles ne ressortiront jamais.


Suspiria, c'est Dario Argento poussant sournoisement l'Alice de Lewis Carroll dans L'enfer de Dante pour se repaître cruellement de son malheur, imaginant avec délice les mises à mort les plus atroces. Instaurant une ambiance lourde et angoissante, nous collant une frousse de tous les diables avec une simple image, une simple mélodie, associant les deux avec une maîtrise sidérante.


Suspiria, c'est enfin une musique, une comptine, un leitmotiv entêtant susurré par Goblin. Illustrant et accompagnant à merveille les délires du cinéaste, et participant grandement à la terreur que nous procure une oeuvre mémorable, puissante, inconfortable et à nulle autre pareille. Un chef-d'oeuvre d'épouvante, version horrifique des Chaussons rouges de Powell et Pressburger qui inspirera bien d'autres artistes au fil des ans.

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le 5 juin 2015

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Gand-Alf

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