Une nouvelle interprétation d'un drame horrifique aux sorcières machiavéliques.

La version de Suspiria de Lucas Guadagnino n’a rien à envier à celle de 1977 réalisée par de Dario Argento. S’il reprend la trame (une jeune Américaine intègre une prestigieuse et mystérieuse école de danse allemande), le réalisateur italien propose ici sa propre interprétation de ce drame fantastique aux sorcières machiavéliques.


Le film se divise en sept parties : six actes et un prologue qui apportent au film sa structure mais également des temps de récupération au spectateur, de plus en plus terrifié à mesure que l’intrigue se dessine. Cette structure donne également au film l’allure d’un conte horrifique, d’autant que les sorcières aux rituels sataniques constituent ici la principale source anxiogène.


Avant d’être une histoire de sorcières, Suspiria est l’histoire d’une danseuse, Susie Banion. Jeune américaine issue d’une famille religieuse et conservatrice, Susie espère assouvir sa soif de liberté en déménageant à Berlin, encore divisée au moment du récit. Depuis sa plus tendre enfance, la jeune Susie est irrésistiblement attirée par l’Allemagne et plus particulièrement par Berlin où se trouve la compagnie de danse de la terrible Markos et de l’énigmatique Madame Blanc. Susie arrive à Berlin par un jour pluvieux et passe avec brio son audition. Il s’établit entre elle et Madame Blanc une connexion qui dès le début du film dépasse toute appréhension rationnelle. En effet, assez rapidement se multiplient des phénomènes inexpliqués et des disparitions inquiétantes, notamment celle de Patricia, interprétée par Chloë Grace Moretz, méconnaissable à l’écran. Cette autre danseuse semble avoir sombré dans la folie et être en proie à des hallucinations depuis qu’elle a intégré la compagnie. Elle disparaît juste après avoir employé le terme de « sorcières » pour décrire à son psychanalyste (un personnage qui gagne en importance à mesure que le film avance) les phénomènes paranormaux qui ont lieu à l’intérieur de ce bâtiment aux nombreuses pièces secrètes.


La compagnie s’apparente ici à un corps dont la tête serait Markos, une vieille sorcière, fondatrice de la compagnie et les différentes danseuses les membres et les organes. Une énergie surnaturelle émane des corps et circule entre les danseuses, les chorégraphes et la bâtisse. Susie présente une sensibilité particulière à cette énergie et semble dès le début parfaitement en phase avec ce bâtiment et cette compagnie profondément macabre. Cette sensibilité lui obtient le premier rôle de la pièce Volk qui donnera lieu à la scène la plus difficile à regarder du film : à mesure que Susie s’approprie et exécute les pas, une autre danseuse, alors attirée au sous-sol par une mystérieuse voix, perd le contrôle de son corps, qui est balancé d’un bout à l’autre de la pièce, dans des positions de moins en moins possibles.


Susie semble ici destinée à occuper un rôle central pour la compagnie et malgré les avertissements de son amie Sarah, elle va peu à peu se préparer pour la mystérieuse cérémonie où elle cédera son corps à Markos pour que son esprit à jamais ne vive en elle. Quand Susie est finalement prête, qu’elle renie sa mère et pénètre dans la salle de la cérémonie, on découvre que Markos n’était pas la véritable mère Susporium, qui n’est autre que Susie. Sans suit un carnage comme on n’en voit rarement pour un film que l’on peut tout de même qualifier d’auteur. Susie, alors présente à l’écran sous la forme d’un démon, trucide toutes les partisanes de Markos dans un bain de sang satanique, sous les yeux horrifiés du psychanalyste. Ce dernier jouait le rôle de « témoin » et avait essayé de percer les mystères de l’institution suite à la disparition de sa patiente.


On va voir Suspiria pour voir un film d’horreur qui sort de l’ordinaire. Inutile de passer par les artifices classiques du genre pour donner la peur de sa vie au spectateur. Avec Suspiria, on est plongé dans un univers et une ambiance qui glacent le sang tout en restant relativement poétiques et dont les mystères ne sont toujours pas résolus à la fin de l’épilogue.

la_meule
7
Écrit par

Créée

le 15 déc. 2020

Critique lue 57 fois

la_meule

Écrit par

Critique lue 57 fois

D'autres avis sur Suspiria

Suspiria
Velvetman
8

The Suspirium Dance

Ô combien périlleuse est l’idée du remake. Les tentations sont nombreuses. Se servir du matériel de base, s’aventurer dans des zones ombrageuses ou alors s’assoir dans une zone de confort pour faire...

le 20 nov. 2018

46 j'aime

1

Suspiria
mymp
5

Make a witch

Luca Guadagnino a l’air de vouloir s’amuser en alternant projets originaux et reprises de grands classiques. Après Amore donc, Guadagnino revisite La piscine (A bigger splash) façon glam et...

Par

le 16 nov. 2018

40 j'aime

Suspiria
HugoShapiro
8

Soupirer pour mieux respirer

Je ne donnais pas cher de la peau d'un remake de Suspiria. Bien que je le trouve sur-estimé pour ce qu'il est intrinsèquement, à savoir un bel objet cinématographique qui n'a rien à défendre au delà...

le 1 nov. 2018

36 j'aime

3

Du même critique

Suspiria
la_meule
7

Une nouvelle interprétation d'un drame horrifique aux sorcières machiavéliques.

La version de Suspiria de Lucas Guadagnino n’a rien à envier à celle de 1977 réalisée par de Dario Argento. S’il reprend la trame (une jeune Américaine intègre une prestigieuse et mystérieuse école...

le 15 déc. 2020