En salle, le 12 février 2015
Écran ordinateur, 9 août 2020
Voilà un cinéma capable d'embrasser l'intime et le collectif dans une même ivresse jubilatoire. Un acte de cinéaste libéré de l'explication et aussi libre que mille récits dansants, flottants dans l'atmosphère.
Trois hommes, quatre parfois, discutent comme des papes, joyeux de leur joie contagieuse, contagieux de leur amitié intellectuelle et sensible. Trois hommes qui parlent en chantant, chantent en parlant, en extase devant la beauté de leur pays et des femmes.
La scansion est une opération magique, un enchantement du réel, et Bressane la met au point ici, définitivement.
D'un même élan, il tire des chansons un suc nouveau pour son cinéma, une sorte de condensé d'histoire, de vies passées et futures, la ligne de force de l'âme d'un pays. Sa mise en scène se fait au plaisir du temps et des corps. Le Tabou de Murnau et la pornographie sont réintégrés à leur origine sensuelle, quasi innocente, comme si le rythme, la musique, la langue, les gestes, les actions, tout ceci revu, revivifié par le cinéma, par sa capacité à retisser toutes les émotions humaines, à en révéler l'extraordinaire invention, comme si tout ceci pouvait nous rendre à nouveau vierges pour un pays de Cocagne, nous refaire sans fautes pour un paradis sans menace, définitif.
Merci Monsieur Bressane, on reviendra chez vous dès qu'il s'agira de quitter notre enfer, sincèrement, honnêtement, intelligemment.