Sous ses airs de comédie romantique convenue à l'eau de rose, le premier film de Akiko Ōku à nous parvenir cache bien son jeu. On croirait presque reconnaître Lars Von Trier derrière cette caméra nerveuse, ces sautes d'axe permanentes et ce formalisme généreux. On est pourtant face à un film bien plus pop, profondément ancré dans son genre et son pays, qui cache une certaine morosité derrière sa bienveillance.


Car il est finalement bien plus question d'angoisse que de tempura : Mitsuko subit la solitude moderne, celle des grandes villes surchargées et des entreprises en open-space, alors que les opportunités de rencontres sont légion. Il y a un certain malaise à voir la jeune femme frôler la crise d'angoisse en avion ou presque sombrer dans la folie en discutant avec sa voix-off, elle qui est si attachante en société. On s'amuse des babioles qui envahissent son appartement tout en constatant leur futilité. Son voyage dans cette Italie instagrammable est certes dépaysant, mais les personnages restent enfermés, prisonniers de leurs tristesses. Tous les effets visuels ou sonores viennent retranscrire une certaine perte de contact avec la réalité, à l'image de cette caméra vivante et hors-sol qui n'est pas sans rappeler Angst.


Pour une comédie romantique, Tempura a l'intelligence de ne pas se conclure sur l'inévitable mise en couple des deux protagonistes, rejetant cette vision naïve comme quoi une relation amoureuse permet de faire la paix avec soi-même. La scène la plus angoissante du film intervient d'ailleurs lorsque les deux amants se retrouvent dans une chambre d'hôtel et se retrouvent paralysés par leur malaise. Le récit garde cependant une certaine légèreté grâce à son humour attendrissant qui retranscrit la béatitude naïve du sentiment amoureux.


Parce qu'il refuse d'être bêtement feel-good et prend le temps de retranscrire le mal-être de son héroïne pour mieux la guérir, Tempura est une franche réussite et l'un des films les plus chaleureux de l'année.


Site d'origine : Ciné-vrai

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le 23 août 2022

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